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Un moine de Vallombreuse l’attaqua, le dénonça aux inquisiteurs et aux princes, présenta Beccaria comme un athée et comme un séditieux qu’il fallait punir, altéra le texte de son ouvrage, et l’accusa de blasphèmes qu’il est impossible de trouver dans les pages du livre des Délits.

Beccaria eut pu se dispenser de répondre à ce vil pamphlet ; il le fit cependant, parce qu’il vivait dans un pays difficile ; et les trois doigts qui avaient tracé la défense animée du genre humain, écrasèrent l’ennemi de l’humanité et de la raison.

Néanmoins, le livre de Beccaria fut proscrit à Venise par les inquisiteurs d’état ; on cabala dans Milan ; et il fallut au jeune philanthrope toute la protection du comte Firmiani, qui avait quelque puissance dans le gouvernement, pour le soustraire aux persécutions de ses compatriotes, dont il est aujourd’hui l’orgueil.

Les ennemis de la philosophie se déchaînèrent aussi chez nous contre un livre qui devait nous amener les plus heureuses réformes. Linguet, dans ses Annales, l’attaqua avec une méchanceté si adroite, qu’il eût pu nuire à l’estime qu’on avait pour l’auteur, si le public n’eût su quelle foi il devait aux jugemens de Linguet, si les calomnies les plus plates ne se fussent dévoilées d’elles-mêmes dans sa critique, et si Linguet n’eût trop laissé percer les vils motifs qui le poussaient à écrire.

Ainsi les ennemis mêmes de Beccaria reprochèrent