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SUPP. AU CHAP. XII.

autre genre de supplice, La lumière éblouissante d’un réverbère remplace l’obscurité ; la lueur est tournée sur le grabat du prisonnier, lequel, pour éviter son éclat incommode, est obligé de tenir ses yeux affaiblis constamment fermés.

» Pendant ce temps, un agent de police, placé à l’autre extrémité du cachot et assis devant une table, l’observe en silence ; il épie ses mouvemens ; il ne laisse échapper aucun de ses soupirs sans en prendre note ; il recueille les paroles et les plaintes que la douleur lui arrache ; il lui ôte la dernière consolation, qu’on ne peut refuser à un infortuné, celle de gémir seul.

» Heureux le prisonnier, si ces agens mercenaires, qui se succèdent pour le surveiller, ne mentent jamais à leur conscience et à la vérité !

» Le temps pendant lequel on est soumis à ce régime, n’a point de mesure ; il est à l’arbitraire du magistrat. Tel y a été laissé cinq cent cinquante-deux jours, tel autre trois cent soixante-douze, tel autre cent un. Après ce traitement, ce n’est plus un homme qu’on rend à la lumière, c’est un spectre, c’est un cadavre, qui a souvent perdu jusqu’à la sensation de la douleur.

» Voilà par quelles tortures nous avons remplacé la question préparatoire d’autrefois.

» Enfin, lorsqu’un accusé est condamné à la peine capitale, si on espère en obtenir quelque révélation, on le soumet à de nouveaux tourmens,