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CHAPITRE XII.

D’ailleurs, est-il juste de tourmenter un homme pour les crimes d’un autre homme ? Ne peut-on pas découvrir les complices par les interrogatoires de l’accusé et des témoins, par l’examen des preuves et du corps de délit, enfin par tous les moyens employés pour constater le délit.

Les complices fuient presque toujours, aussitôt que leur compagnon est arrêté. La seule incertitude du sort qui les attend, les condamne à l’exil, et délivre la société de nouveaux attentats qu’elle pourrait craindre d’eux ; tandis que le supplice du coupable qu’elle a entre les mains, effraie les autres hommes, et les détourne du crime, ce qui est l’unique but des châtimens[1].

  1. Cette raison est bien faible ! Ils fuient d’une forêt dans une autre forêt. Ils passent d’une ville dans une autre ; mais s’exilent-ils d’un état ? Et quand ils s’en exileraient, l’humanité envers un coupable doit-elle l’emporter sur le soin de délivrer les peuples des brigands et des assassins qu’on leur envoie par une fausse compassion ? Pensez que quelques minutes de tourmens dans un scélérat (convaincu), peuvent sauver la vie à cent innocens que vont égorger ses complices, et la question vous paraîtra (alors) un acte d’humanité. (Note de Diderot.) Mais Diderot s’est trompé. La suppression de la torture a prouvé qu’elle