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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

lui demanda-t-il ; j’espère qu’elle me permettra de conserver toujours auprès d’elle le rôle de M. de Lauzun.

La marquise se mordit les lèvres.

— Eh bien, ajouta-t-il en s’adressant à sa femme, vous rentrez dans votre bien, madame la maréchale, convenez qu’il n’y a que moi pour les recouvrements onéreux ? Si ce n’était pas une besogne trop rude, je réclamerais l’honneur de me charger de vos affaires.

Se levant ensuite et saluant M. de Lauzun :

— La plaisanterie est parfaite, monsieur le comte, ajouta-t-il à voix basse ; je vais de ce pas la raconter à Mademoiselle. Vous n’eussiez pas mieux fait, sur l’honneur, il y a dix ans.

Et il sortit après ce sarcasme.


XI

LE VER CACHÉ.


Il est nécessaire de dire ici quelques mots de la demeure nouvelle choisie par Lauzun, bien que dans le cours de l’histoire précédente (celle de Charles Gruyn), nos lecteurs aient déjà fait connaissance avec elle.

Ce fut du cordonnier Féret que le comte acheta cet hôtel abandonné ; le contrat de vente ne laisse à cet égard aucun doute[1].

Mademoiselle habitait à cette époque le Luxembourg.

Maîtresse d’une fortune énorme, Mademoiselle était déjà dans un âge assez avancé, elle avait créé Lauzun d’un seul souffle d’elle, et le connaissait de longue main. Elle l’avait suivi tour à tour dans ses phases galantes avec madame de

  1. Nicolas Féret, cordonnier, bourgeois de Paris, était curateur à la succession vacante de Charles Gruyn. L’original du contrat est signe Féret, Lauzun et Gruyn de Préaux. L’hôtel fut vendu moyennant soixante-quatre mille livres.