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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

monsieur le prince, il vous appartient de m’en punir en me prouvant à quel point vous êtes généreux.

— Comment cela ?

— Voici des papiers qui intéressent madame de Roquelaure, quelle que soit la suite de ce duel, jurez-moi… Et surtout le plus grand secret…

— Peste ! murmura le prince de Monaco à part lui, ce pauvre Roquelaure !

— Ce pauvre Monaco ! pensait également le maréchal.

— Messieurs, nous vous attendons, dit Barailles aux deux témoins.

— Nous sommes à vos ordres, monsieur, reprirent Monaco et Roquelaure.

Au premier croisement d’épée, M. d’Alluye porta un coup terrible à Lauzun qui le para. Barailles sentit un froid inconnu lui courir par tout le corps.

Roquelaure se tenait derrière le marquis, et lui répétait :

— Je vous conjure de me croire, monsieur le marquis, c’est un homme qui s’est rouillé complétement à Pignerol.

Ces paroles traîtresses encouragèrent d’Alluye, il fondit sur le comte avec une nouvelle impétuosité. Lauzun l’attendait, il tendit le fer, mais ce fer se rompit contre un désarmement vigoureux. L’épée du comte vola à trois pas.

M. d’Alluye dissimula la joie de ce triomphe mais Roquelaure et Monaco laissèrent échapper un geste de satisfaction.

Barailles était accouru près de Lauzun, mais Barailles ne se souciait guère de lui prêter son épée…

Lauzun n’osait ramasser la sienne, il éprouva pour une seconde un embarras qui le fit pâlir…

Le carré où la rencontre avait lieu débouchait sur quatre routes ; tout d’un coup Lauzun vit venir à lui un homme qu’il ne s’attendait guère à trouver au rendez-vous.

Ce singulier personnage portait un feutre gris qui lui couvrait à demi les yeux, il était enveloppé d’un manteau