Madame d’Alluye balbutiait un prétexte, et se rejetait sans doute sur la fatigue du bal, quand le duc de Roquelaure arriva près d’elle d’un air affairé en s’écriant :
— Madame la marquise, votre éventail !
Et comme elle hésitait :
— Votre éventail, dit-il, pour madame de Roquelaure ; elle a perdu le sien, et la chaleur la suffoque !
En prononçant ces mots, le duc s’empara de l’éventail ; il en tomba un papier.
— Que veut dire ceci ? demanda le marquis en ramassant le billet.
— Madame d’Alluye, reprit Lauzun en s’avançant et sans avoir vu le mouvement du marquis, veut-elle accepter mon bras pour la première courante ?
— Pas avant que je ne vous aie dit un mot, monsieur de Lauzun, reprit le marquis.
— Deux, si cela vous plaît, monsieur d’Alluye. Dans un instant, madame la marquise.
MM. d’Alluye et de Lauzun parlèrent seuls à voix basse. Quand Lauzun revint, la marquise était plus morte que vive. L’archet donnait le signal, Lauzun lui prit la main ; elle se trouvait placée dans le quadrille vis-à-vis mademoiselle de Retz.
— Entre Minerve et Vénus… dit Lauzun en souriant, le hasard me gâte, c’est de bon augure pour demain.
— C’est donc pour demain ? demanda madame d’Alluye que ses genoux pouvaient à peine soutenir, tant elle tremblait.
— Pour demain, chère marquise, mais vous me restez ce soir.
Comme elle commençait la danse, mademoiselle de Retz accrocha l’une des dentelles de Lauzun.
— La sagesse me retient, dit-il à la marquise, mais auprès de vous la mienne s’en va. Savez-vous bien que dans tout ce bal je n’aime que vous !
Lauzun en dit autant, dans la courante qui suivit, à ma-