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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

ciel, répondez. Ne voyez-vous pas que chaque seconde qui s’écoule, est pour moi un coup de poignard ?

— C’est que… reprit-elle avec terreur, c’est… que celui qui a exécuté ce vol…

— Eh bien ?

— Eh bien, c’est votre fils !

— Mon fils ! demanda Leclerc en laissant retomber sa tête avec accablement sur sa poitrine.

— Votre fils, répéta-t-elle d’une voix sourde.

— Oh ! je comprends tout, maintenant ; son départ, sa fuite de la maison paternelle. Il savait qu’en reparaissant devant moi, il ne pouvait soutenir les yeux de son juge… Mais qui donc a pu lui conseiller un tel crime, qui donc a pu lui révéler ce secret que j’avais dit à vous seule ?

— Moi, murmura-t-elle, en se précipitant à ses genoux, pitié, par grâce, pitié !

— Vous ! mais il faut donc que je vous maudisse tous deux ! Pitié, dites-vous, mais vous avez abusé lâchement de mon aveu, quand vous avez introduit le vol dans ma maison ? Oh ! je fus aveugle en vous confiant un malheur auquel vous avez donné des larmes feintes ! Maintenant, je ne vois que trop de quel intérêt il était pour vous de faire disparaître cette bague accusatrice. Les armes du surintendant y étaient gravées, n’est-ce pas, continua Leclerc avec un sourire effrayant, et ce sont les mêmes armes qui cachetaient à La Vallière des propositions de honte et de fortune ! En fille dévouée, il vous tardait d’anéantir cette preuve !

— Vous calomniez, monsieur, reprit mademoiselle Leclerc en se relevant avec une fierté calme, vous oubliez que je vous avais fait une promesse… Mais pour l’accomplir !

— Eh bien ?

— Eh bien, monsieur, il me fallait cette bague.

— Quoi !… vous auriez réussi ! Enfin, je tiens ma vengeance ! Cette bague et cette preuve, vous l’avez, dites-