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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

La vue de Lauzun s’obscurcissait peu à peu, la vapeur légère répandue autour de lui devenait intense, pesante. Le comte porta la main à son front, sa respiration était pénible.

— De l’air ! de l’air ! cria-t-il tout d’un coup en se précipitant vers la fenêtre qu’il ouvrit.

Un rire satanique, aigu, lui répondit seul quand il chercha des yeux mademoiselle Fouquet en revenant au sofa. L’une des portes mystérieuses du boudoir venait de s’ouvrir, un bras plus prompt que l’éclair avait enlevé celle que Lauzun croyait trouver.

— Riom, s’écria Lauzun furieux en courant vers la porte dont le panneau se referma, tu l’as vu ?

— Elle, je le crois bien, dit Riom en sortant de sa cachette.

— Non, lui !

— Tous deux, mon oncle. Mais qu’est-ce que ceci ? poursuivit-il, en poussant du pied une mèche noirâtre qui fumait encore près du sofa adossé à la porte en question.

— Est-ce que je sais, moi ! reprit le comte hors de lui ; tout ce que je sais, c’est que je l’ai vu, bien vu.

Riom écrasa la mèche du bout de son pied ; elle répandait encore une odeur vertigineuse. Riom déclara que c’était l’encens du diable.

— Quelle figure lui as-tu vue ? demanda Lauzun à Riom.

— Mais une assez belle… autant que j’ai pu juger. C’est un grand homme pâle qui a le poignet leste. Il enlève les femmes avec une adresse…

— Malédiction ! s’écria Lauzun ; oh ! mais, cette fois… Vite, vite, Barailles, à moi, mes gens ! continua-t-il en se suspendant au cordon d’une sonnette. Que l’on sonde l’hôtel, qu’on me cherche des exempts ! Il ne sera pas dit qu’on se gausse de moi. Riom, tu vas me suivre, tu vas…

— Monsieur le comte a besoin de moi ? demanda Barrailles, en ouvrant la porte avec lenteur ; mademoiselle Fouquet demande peut-être son carrosse, son cocher est dans la cour.