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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

Madame de Roquelaure continua :

« Je commence par le roi, mon très haut maître et seigneur : je lui lègue un autre ministre que M. de Louvois. »

— Diable ! murmura Cavoie, ceci sent son de Vardes d’une lieue. Heureusement que Sa Majesté est à Versailles, et que M. de Louvois est dans son lit.

« Après le roi, dont je n’ai jamais décliné le service, je dois m’occuper en premier lieu de Mademoiselle. »

— Ah ! voici l’article intéressant, dit le maréchal d’Humières ; voyons comment Lauzun s’en tirera.

« Je demande pardon à Mademoiselle, poursuivit la maréchale de Roquelaure en lisant le testament, de n’avoir été pour elle qu’un mari indigne, et de lui avoir préféré… »

Ici la maréchale s’arrêta et reprit haleine.

— Eh bien, madame la maréchale ? demanda le duc de Roquelaure, vous semblez embarrassée… Permettez, de grâce…

Et Roquelaure fit un mouvement pour remplacer la maréchale et poursuivre la lecture du testament, dont il voulut s’emparer.

— Arrêtez ! s’écrièrent à la fois le prince de Monaco, le maréchal d’Humières et M. d’Alluye. Passez les noms, madame la maréchale.

— Au contraire, messieurs, reprit la maréchale en se rassurant, je tiens à remplir mon emploi de lectrice. Souffrez que je continue.

« De n’avoir été pour elle qu’un mari indigne, et de lui avoir préféré… »

Ici, il y eut une nouvelle explosion de murmures. Madame de Monaco se cacha sous l’éventail, madame d’Alluye rougit, madame d’Humières toussa, et mademoiselle de Rets baissa les yeux.

Madame de Roquelaure ne fit aucune attention à ce qui se passait autour d’elle, et poursuivit pour la troisième fois :

« Et de lui avoir préféré… »