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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

de se rendre en ce boudoir… Que ce rendez-vous ne l’effraye en rien, la déesse de la Sagesse n’a rien à craindre.

Mademoiselle de Retz sourit, c’était la première fois que le duc lui parlait, elle en avait peur, elle obéit.

Le duc de Roquelaure s’en fut alors trouver madame d’Alluye. Excitée par la vengeance, la jolie marquise parcourait vainement les salons sans avoir pu réussir encore à rencontrer mademoiselle de Retz.

— Elle est là… dans ce boudoir, lui dit Roquelaure : il n’y a pas un instant à perdre, ajouta le duc en lui montrant la pendule.

— Onze heures trois quarts venaient de sonner en effet, la surprise annoncée devait avoir lieu quand l’aiguille aurait atteint le chiffre de douze.

La marquise, en trouvant mademoiselle de Retz dans le boudoir, ne put contenir l’expression de son dépit.

— Nierez-vous, mademoiselle, lui dit madame d’Alluye avec hauteur, que vous ayez écrit à M. le marquis de revenir ? Votre billet contenait même à mon endroit une apostille au moins singulière.

— Je ne sais ce que vous voulez dire, madame la marquise, répondit mademoiselle de Retz, étonnée au dernier point ; quel intérêt puis-je avoir à ce que M. d’Alluye quitte Amboise ? Quand M. de Lauzun y gardait ses arrêts par ordre du roi, à la bonne heure.

— De l’ironie ! à merveille ! mais ce billet ?

Et la marquise présenta à mademoiselle de Retz le billet de Roquelaure.

— On a contrefait mon écriture, reprit mademoiselle de Retz, et voilà tout. Je vous prie, madame la marquise, de croire que nous combattrons toujours à armes égales… Je sais comme vous ce qui va se passer ici, et en venté, ce n’était pas la peine de faire courir la poste à M. d’Alluye…

— C’est cela, reprit la marquise, feignez encore d’ignorer son caractère hautain, absolu ; la haine qu’il porte à M. de Lauzun…