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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

veille, murmura le comte en prenant note de ces noms sur son calepin ; j’aime à voir que ces messieurs ont leurs raisons.

— Ah ! reprit Riom, il y avait aussi Charost et Louvois, vos ennemis acharnés.

— Pour ceux-là, c’est de l’escarmouche politique, et j’en fais fi. Mais, dis-moi, Riom, dans quelle belle assemblée m’habillait-on de la sorte ?

— Chez madame de Montespan.

— À merveille, il faut bien que la marquise s’amuse. Elle enrage de me savoir rentré à Paris. Je l’estime assez pour croire qu’elle n’était pas seule à faire la curée de ma personne.

— Oh ! pour cela, non, car il y avait chez elle hier, ou plutôt cette nuit, grande foule au petit jeu. Madame la maréchale de Roquelaure, qui connaît de vous bon nombre d’histoires…

— Ah ! madame de Roquelaure ! reprit le comte en écrivant de nouveau sur son carnet. Cette bonne maréchale, elle me trouve peut-être aussi laid que son mari ?

— C’est difficile. Toutefois elle semblait plaindre le sort de Mademoiselle. Elle lui a laissé, disait-elle, récemment encore, Thiers, Châtellerault et Saint-Fargeau, ce qui lui fait, bien deux cent mille livres de revenu, et avec cela il est d’une lésinerie !

— Apparemment madame de Roquelaure est plus généreuse… pour ceux qui la servent, Riom, il y a de quoi !

— Mais voyez donc comme il s’est casematé dans son hôtel de l’île, reprenait la princesse de Monaco, la maison du Dauphin et celle de Monsieur viennent de lui être rouvertes, à peine y met-il le pied. C’est un petit esprit, un nommé jaloux de Sa Majesté… j’aime bien mieux Buckingham.

— Et moi, le comte de Vaux, disait madame de Cœuvres.

— Est-il vrai, mesdames, qu’il ait porté un masque de fer à Pignerol ? demandait naïvement le prince de Monaco.

— Il a cent ans de plus, disait Roquelaure.