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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

— Pompeo, reprit le masque, tu n’as pas, je pense, oublié nos conventions ?

— Non, monseigneur ; les vôtres pas plus que les miennes.

Le docteur réprima un sourire d’amer dépit.

— Tu sais que la vengeance de Richelieu est souvent de la justice… continua-t-il cauteleusement.

— Je sais que le cardinal a sans doute le droit de faire ce que vous allez me dire de faire ici, répondit Pompeo, devenu pâle.

— Regarde donc, dit le masque, et tiens-toi prêt !

Le docteur ouvrit alors les rideaux du lit, et montra à l’Italien la femme endormie.

En voyant ce visage recouvert d’un voile noir, Pompeo réprima un tressaillement léger.

— Quelque crime d’État, murmura-t-il… une femme qui n’est plus déjà qu’un cadavre.

— Un cadavre, reprit le docteur, tu l’as dit. Lui entends-tu prononcer une plainte sous cette gaze ? Réponds, parle-t-elle ?

L’Italien se signa.

— Donc, continua le docteur, tu vas prendre ce corps et l’enfermer dans ce sac, Derrière elle, tu vois également ce coffre ?

— Oui, monseigneur, je le vois.

— Ce coffre et cette femme doivent disparaître à tout jamais… Dépêchons.

Pompeo demeurait anéanti, un combat intérieur brisait ses forces.

— Ils disparaîtront comme Samuel, reprit-il ; vous me l’avez juré !…

Et l’Italien montrait du doigt un crucifix à son guide. Devant cette image sacrée, le docteur recula d’abord ; puis il reprit :

— Oui, je jure encore que tu verras Samuel !

Oui, continua-t-il à part lui, tu le verras !

— Et je pourrai me venger sur lui ?

— Tu te vengeras.