Page:Beaunier - Visages de femmes, 1913.pdf/75

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
58
VISAGES DE FEMMES

qu’avec toute sa ferveur insigne Jacqueline a été sur le point de renoncer à faire profession. Elle fut (et c’est elle-même qui l’écrit) dans l’alternative « de différer sa profession de quatre ans pour retirer son bien de l’engagement où il était, sans même être assurée qu’il pût être entièrement libre » alors, ou bien d’accepter « la confusion d’être reçue gratuitement et de faire cette injustice à la Maison ». Elle hésita ; et, si elle hésita, Pascal avait pu croire qu’elle lui reviendrait. Il la connaissait ; et il savait l’honnête orgueil que n’avait pas détruit en elle l’humilité religieuse : pour employer un mot de lui-même, il « pariait » assez bien. Elle hésita, de la manière la plus cruelle pour son désir du cloitre ; et elle allait refuser la joie de la profession, quand la mère Agnès et M. Singlin, non sans peine et non sans des heures d’insistance, la décidèrent à entrer au couvent sans dot. Persuadée là-dessus, elle supplia qu’on la reçût en qualité de sœur converse, en qualité de servante : et, par son quotidien service de pauvre fille, elle rachèterait la grâce qu’on lui faisait en la recevant gratuitement. Il fallut, pour l’apaiser, une nouvelle et très pressante intervention de la mère Agnès et de M. Singlin. Elle eut sur son visage une « tristesse extraordinaire » ; elle ne pouvait se décider ; elle pleura et sanglota, longtemps, la tête appuyée sur l’épaule de la mère Agnès. Et la mère Agnès lui fut adorablement maternelle,