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JACQUELINE PASCAL

craint pas la réalité des choses et des paroles.

Elle écrivit à son père; et sa lettre, on l’a justement comparée à la prière que, dans Racine, adresse au roi des rois la jeune et tremblante Iphigénie. « Monsieur mon père... Avant toutes choses, je vous conjure, au nom de Dieu (que nous devons seul considérer en toutes matières, mais particulièrement en celle-ci), de ne vous point étonner de la prière que je vous vais faire, puisqu’elle ne choque en rien la volonté que vous m’avez témoigné que vous aviez. Je vous conjure aussi, par tout ce qu’il y a de plus saint, de vous ressouvenir de la prompte obéissance que je vous ai rendue sur la chose du monde qui me touche le plus et dont je souhaite l’accomplissement avec le plus d’ardeur. Vous n’avez pas oublié sans doute cette soumission si exacte; vous en parûtes trop satisfait pour qu’elle soit si tôt sortie de votre esprit... » Ainsi parle Iphigénie, avec maintes précautions de pensée et de langage : elle organise un discours, peureux, attentif et résolu; elle ne va pas tout de suite au fait et sans avoir adouci les chemins de la persuasion difficile. Jacqueline demande quinze jours, comme en prennent à l’ordinaire les personnes de toutes les conditions, et même engagées dans le monde, pour se recueillir, à l’approche des grandes fêtes et pour s’entretenir avec Dieu seul parmi des personnes qui ne soient qu’à lui. Son père voudra-t-il lui refuser une chose si