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comme formant une classe privilégiée ; ils se croient tous supérieurs à d’autres hommes (les nègres). L’exercice de leurs droits de maîtres sur leurs esclaves les entretient encore dans ces idées de supériorité et développe en eux des sentiments d’orgueil ; la couleur blanche est regardée, dans le Sud, comme une véritable noblesse. Les blancs se traitent donc entre eux avec d’autant plus d’égards et de bienveillance qu’il se trouve à côté d’eux des hommes auxquels ils n’accordent que des mépris. Il s’introduit ainsi dans les mœurs du Sud quelque chose d’aristocratique, et il en résulte des formes moins communes et une sociabilité plus distinguée que dans celles des États du Nord.

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  • La grossièreté des Américains.

Il ne faut point accepter les exagérations que les Anglais débitent à ce sujet ; mistress Trolloppe dit, t. 1, p. 27 : « Je déclare avec sincérité que j’aimerais mieux partager le toit d’une troupe de cochons bien soignés, que d’être renfermée dans une de ces cabines. » (Elle parle des bateaux à vapeur sur le Mississipi.) Ce sont là de grossières injures. Il est certain qu’avec leur habitude de mâcher du tabac, qui entraîne le besoin de cracher, les Américains choquent quiconque est accoutumé à des mœurs polies ; il n’est pas moins certain que leur défaut complet de galanterie déplaît aux femmes ; enfin il y a désappointement complet pour qui cherche chez eux l’élégance des manières et l’urbanité des formes… Mais ici doit s’arrêter la critique.

Les Américains ne font point la cour aux femmes, mais ils les respectent, et ce sentiment de respect, qui ne se montre point au dehors, est bien plus profond chez eux qu’il ne l’est dans nos pays de civilisation et de galanterie.

Dans les bateaux à vapeur dont parle mistress Trolloppe on trouve une société peu polie, à la vérité : ce sont des marchands qui vont de l’Ohio ou du Kentucky dans la Louisiane ou dans les contrées de la rive droite du Mississipi ; mais ils ne présentent point le spectacle dégoûtant que suppose l’auteur anglais. En général, ces bateaux à vapeur sont vastes, propres, élégants ; on en compte plus de deux cents qui remontent et descendent sans cesse le grand fleuve. La nourriture y est abondante et saine et le prix du passage est incroyablement bon marché : on va de Louisville à la Nouvelle-Orléans pour 120 francs, y compris la nourriture ; le trajet est de 500 à 600 lieues. Ayant fait ainsi le voyage, j’en puis parler sciemment ; on est si commodément dans