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tombe. Enfin, ce qui demeure bien prouvé, c’est que (économiquement parlant) l’esclavage est nuisible lorsqu’il n’est pas nécessaire, et qu’il a été jugé tel par ceux qui auparavant l’avaient cru indispensable. Mais il se présente contre l’abolition de l’esclavage des objections bien autrement graves que celle du plus ou moins d’utilité dont le travail des nègres peut être pour les blancs.

TROISIEME OBJECTION. — Supposez le principe de l’abolition admis, quel sera le moyen d’exécution ?

Ici deux systèmes se présentent : affranchir dès à présent tous les esclaves ; ou bien abolir seulement en principe l’esclavage, et déclarer libres les enfants à naître des nègres. Dans le premier cas, l’esclavage disparaît aussitôt, et, le jour où la loi est rendue, il n’y a plus dans la société américaine que des hommes libres. Dans le second, le présent est conservé ; ceux qui sont esclaves restent tels ; l’avenir seul est atteint ; on travaille pour les générations suivantes.

Ces deux systèmes, assez simples l’un et l’autre dans leur théorie, rencontrent dans l’exécution des difficultés qui leur sont communes.

D’abord, pour déclarer libres les esclaves ou leurs descendants, l’équité exige que le gouvernement en paie le prix à leurs possesseurs : l’indemnité est la première condition de l’affranchissement, puisque l’esclave est la propriété du maître.

Maintenant, comment opérer ce rachat ?

Le gouvernement américain se trouve, dit-on, pour l’effectuer, dans la situation la plus favorable ; car la dette publique des États-Unis est éteinte : or, les revenus du gouvernement fédéral sont annuellement de cent cinquante-neuf millions de francs. Sur cette somme, soixante-quatorze millions sont absorbés par les dépenses de l’administration fédérale ; restent donc quatre-vingt-cinq millions qui, précédemment, étaient consacrés à l’extinction de la dette publique, et qui, maintenant, pourraient être employés au rachat des nègres esclaves.[1]

  1. V. National calendar, 1833. Vº Public revenues and expenditures.