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fée, je ne sais laquelle des deux. Cet être bienfaisant me mit tout-à-coup dans une abondance à laquelle je n’eusse osé prétendre. Qu’arriva-t-il de là ? Je devins paresseux. Je ne m’occupai plus que de bagatelles ; et, depuis ce jour, il n’est pas sorti un bon ouvrage de ma plume. Je pourrais vous alléguer bien d’autres exemples. Examinez un homme qui prétend avoir place parmi les cordons bleux des beaux esprits, qui postule un fauteuil à l’académie. Quelles peines pour limer un écrit qu’il est prêt de donner au public ! Quelle inquiétude sur le succès de cette pièce ! A-t-il obtenu ce qu’il souhaitait avec tant de passion, ce n’est plus le même homme. Il s’endort, et ne bat plus que d’une aîle. D’où je conclus, qu’il est nécessaire, pour l’avantage des belles-lettres de ne point trop engraisser un auteur, et qu’il faut lui laisser un aiguillon qui le pousse au travail. Je suis de votre avis, monsieur, dit la fée en se rendant visible, et je suis comptable au public de plu-