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à moitié nu. Il n’y avait que de la paille dans la chambre, et la fée fut contrainte de s’asseoir sur le plancher. Y a-t-il long-tems que vous êtes dans cette situation, demanda Bienfaisante ? Depuis deux ans, répondit cet homme : j’étais cordonnier de ma profession ; et, sans avoir jamais été fort riche, je nourrissais honnêtement ma famille. Le feu prit à ma maison, et je perdis dans une nuit tout ce que je possédais ; je devins ensuite perclus des deux jambes, et mes pauvres enfans furent couverts de lèpres. Depuis ce tems-là, il ne me reste de ressource que la charité des fidèles, et je la sollicite chaque jour pour pouvoir donner du pain à mes pauvres enfans. Je m’étonne, lui dit la fée, que vous ayez pu conserver votre tranquillité au milieu de tant de malheurs. Et pourquoi ne l’aurais-je pas conservée, lui dit cet homme ? J’appartiens à un père infiniment bon, et puissant ; je sais bien qu’il m’aime, qu’il peut et qu’il veut me rendre heureux : je m’abandonne donc