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mens ; ma vie était un obstacle à votre félicité et à celle d’un époux qui m’est cher ; il vous aime, ma chère Laure, et il s’est toujours flatté que sa passion m’était aussi inconnue qu’à vous qui en étiez l’objet. On ne vous rendra cette lettre qu’après s’être assuré que vous êtes libre encore : auriez-vous la cruauté de vous engager après l’avoir lue ? Non, votre cœur m’est connu ; le seul devoir vous conduisait à l’autel ; un devoir plus sacré vous en éloignera. Votre reconnaissance à mon égard est une dette plus ancienne que celle de la marquise et de monsieur Dorval ; je le plains bien sincèrement. Vous perdre est un malheur difficile à soutenir : cependant, si ce qu’on m’a mandé de son caractère est vrai, il rendra justice aux droits d’Alindor. Victime, depuis plusieurs années, d’une passion qu’il a vainement essayé de détruire, quel serait son malheur, si, au moment qu’il devient libre, vous consentiez à cesser de l’être. Je lui cache ce que je fais pour lui, et il doit