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gardait avec terreur le moment de son engagement, ce qui la rendait froide et sérieuse. Dorval, qui ne pouvait pénétrer ce qui se passait dans son ame, attribuait sa froideur à sa modestie. Elle essaya pourtant de se contraindre, et de lui marquer plus de satisfaction, lorsque le jour de son mariage fut fixé : elle l’estimait véritablement, et était déterminée à faire tous ses efforts pour l’aimer ; elle parut à ses fiançailles, et au souper qui les suivit, d’un air à persuader qu’elle irait le lendemain à l’autel sans violence, et Dorval en fut si transporté, qu’il se crut, en la quittant, le phis heureux de tous les hommes. Il était plus de minuit, quand on se sépara, et Laure commençait à se déshabiller, lorsqu’elle reçut une lettre qui lui fut remise par le valet-de-chambre d’Armire qui, avant de la lui rendre, avait appris de la marquise qu’elle n’était pas encore mariée. La tristesse de cet homme, l’heure indue à laquelle il était arrivé, la firent frémir, et