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reuse issue de cette affaire, elle n’avait pu parvenir à la rassurer ; et lorsque le marquis l’aperçut, en rentrant chez lui, il recula d’effroi, tant il la trouva changée.

Après ce que j’ai dit de la conduite de cet indigne époux, vous jugez sans doute qu’il était un de ces naturels pervers, en qui il n’y a nulle ressource, et que monsieur de Bellefond n’avait jamais aimé une épouse qu’il avait toujours si fort négligée. Point du tout, le marquis n’était que faible et jeune ; son cœur n’était entré pour rien dans les infidélités qu’il avait faites à la marquise, et elle était la seule femme qu’il estimât, qu’il aimât même ; mais, lié avec ce que la cour et la ville avaient de plus licencieux, il n’avait pu résister au torrent, et s’était chargé de tous les vices de ses faux amis, par habitude, faiblesse, air, prêt à jouer les personnages, les plus opposés pour suivre la mode. Ces sortes de caractères sont aisés à émouvoir ; et, quand ils le sont une fois, il est un moyen de les fixer que la mar-