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des parens de cette fille : ils étaient pauvres. Elle abandonna à leur discrétion le choix des moyens qu’on pourrait prendre pour réparer le tort que son mari leur avait causé ; et, quoiqu’ils abusassent de sa situation pour demander une somme exorbitante, la marquise signa aveuglément tout ce qu’ils voulurent, et en obtint parole de discontinuer leurs poursuites. Le plus difficile restait à faire : la partie publique allait être instruite de cette aventure, par le moyen d’un magistrat, parent de la fille abusée, et qui s’était chargé des poursuites. Il fallait l’empêcher d’aller plus loin : la marquise se rendit chez lui. Il parut surpris du vif intérêt qu’elle prenait au sort d’un époux qui le méritait si peu ; et, voulant profiter du désir qu’elle avait de le sauver, il lui fît entendre qu’elle n’en avait qu’un moyen. La marquise frémit d’horreur à cette proposition, et, quittant brusquement ce juge inique, elle revint chez elle, dans un état capable d’inspirer de la pitié aux cœurs les plus