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ressembler en quelque chose. Il est vrai que Laure connaissait peu sa bienfaitrice ; elle ne l’avait vue qu’à une trop grande distance, pour pouvoir décider de son caractère. Sa générosité à son égard n’était point équivoque ; mais cette qualité n’est point incompatible avec de grands défauts. Elle n’avait pourtant garde de lui en supposer : une telle pensée lui eût paru un crime ; elle la sentait machinalement, sans s’en douter, pour ainsi dire, et cette impression occulte la jetait dans un trouble qui lui laissait à peine la faculté de respirer librement, tant elle en était oppressée ; la présence, de la marquise la rassura.

Cette dame avait une de ces physionomies propres à inspirer la confiance ; son ame était peinte sur son visage, et cette ame eût été capable d’embellir la laideur même. Quel effet devait-elle produire sur des traits d’une régularité admirable ? Laure lui remit, en rougissant, la lettre dont Armire l’avait chargée, et elle avait