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beaucoup d’esprit. La mère était bien joyeuse de tous les dons qu’on faisait à sa fille : belle, spirituelle, une bonne santé, des talents. Qu’est-ce qu’on pouvait donner de mieux à cet enfant qu’on nommait Joliette ? On se mit à table pour se divertir ; mais lorsqu’on eut à moitié soupé, on vint dire au père de Joliette que la reine des fées, qui passait par là, voulait entrer. Toutes les fées se levèrent pour aller au-devant de leur reine ; mais elle avait un visage si sévère, qu’elle les fit toutes trembler. « Mes sœurs, dit-elle, lorsqu’elle fut assise ; est-ce ainsi que vous employez le pouvoir que vous avez reçu du ciel ? Pas une de vous n’a pensé à douer Joliette d’un bon cœur, d’inclinations vertueuses. Je vais tâcher de remédier au mal que vous lui avez fait. Je la doue d’être muette jusqu’à l’âge de vingt ans. Plût à Dieu qu’il fût en mon pouvoir de lui ôter absolument l’usage de la langue. » En même tems la fée disparut, et laissa le père et la mère de Joliette