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n’avait pas le cœur de manger ; mais Belle s’efforçant de paraître tranquille, se mit à table, et le servit ; puis elle disait en elle-même : la Bête veut m’engraisser avant de me manger, puisqu’elle me fait si bonne chère. Quand ils eurent soupé, ils entendirent un grand bruit, et le marchand dit adieu à sa pauvre fille en pleurant ; car il pensait que c’était la Bête. Belle ne put s’empêcher de frémir en voyant cette horrible figure ; mais elle se rassura de son mieux, et le monstre lui ayant demandé si c’était de bon cœur qu’elle était venue ; elle lui dit, en tremblant, qu’oui. Vous êtes bien bonne, dit la Bête, et je vous suis bien obligé. Bon homme, partez demain matin, et ne vous avisez jamais de revenir ici. Adieu, la Belle. Adieu, la Bête, répondit-elle, et tout de suite le monstre se retira. Ah ! ma fille, lui dit le marchand, en embrassant la Belle, je suis à demi-mort de frayeur. Croyez-moi, laissez-moi ici ; non, mon père, lui dit la Belle avec fermeté,