Page:Beaumont - Contes moraux, tome 1, Barba, 1806.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(171)

dèrent à tous ceux du vaisseau, quels étaient leurs noms et leurs qualités. L’orgueilleuse Élise fit écrire les titres de sa famille, et il y en avait plus d’une page. Elle croyait que cela obligerait ces gens-là à la respecter. Elle fut donc fort surprise, lorsqu’ils lui tournèrent le dos sans lui faire politesse ; mais elle le fut bien davantage quand son esclave eut déclaré son nom et sa qualité ; car ces gens lui rendirent toutes sortes de respects, et lui dirent qu’elle pouvait commander dans le vaisseau où elle était la maîtresse. Ce discours impatienta Élise, qui dit à son esclave : Je vous trouve bien impertinente d’écouter les discours de ces gens-là. Tout beau, madame, lui dit le maître de la chaloupe : vous n’êtes plus à Athènes. Apprenez que trois cents esclaves, au désespoir des mauvais traitemens de leurs maîtres, se sauvèrent dans cette île, il y a trois cents ans ; ils y ont fondé une république, où tous les hommes sont égaux ; mais ils ont établi une loi à laquelle il