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ce qui le rendit si fort, qu’il courait tout seul au bout de six mois. Cependant, le fils de la nourrice, qu’elle faisait passer pour le prince, mourut, et le roi et la reine furent charmés d’en être débarrassés. Fatal resta dans le bois jusqu’à deux ans, et un seigneur de la cour qui allait à la chasse, fut tout étonné de le trouver au milieu des bêtes. Il en eut pitié, l’emporta dans sa maison ; et, ayant appris qu’on cherchait un enfant pour tenir compagnie à Fortuné, il présenta Fatal à la reine. On donna un maître à Fortuné, pour lui apprendre à lire ; mais on recommanda au maître, de ne le point faire pleurer. Le jeune prince qui avait entendu cela, pleurait toutes les fois qu’il prenait son livre ; en sorte qu’à cinq ans, il ne connaissait pas les lettres ; au lieu que Fatal lisait parfaitement, et savait déjà écrire. Pour faire peur au prince, on commanda au maître de fouetter Fatal toutes les fois que Fortuné manquerait à son devoir ; ainsi, Fatal avait beau