Page:Beaumont - Contes moraux, tome 1, Barba, 1806.djvu/143

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(139)

obligea le roi de le nommer son héritier ; car, dans ce pays-là, le peuple avait droit de se choisir un maître. Spirituel céda, sans murmure, la couronne à son frère, et rebuté de la sottise des hommes qui n’estiment que la beauté du corps, sans se soucier de celle de l’âme, il se retira dans une solitude, où, s’appliquant à l’étude de la sagesse, il devint extrêmement heureux. Ce n’était pas là le compte de la fée Furie ; elle voulait qu’il fût misérable, et voici ce qu’elle fit pour lui faire perdre son bonheur.

Furie avait un fils nommé Charmant ; elle l’adorait, quoiqu’il fût la plus grande bête du monde. Comme elle voulait le rendre heureux, à quelque prix que ce fût, elle enleva une princesse qui était parfaitement belle ; mais, afin qu’elle ne fût point rebutée de la bêtise de Charmant, elle souhaita qu’elle fût aussi sotte que lui. Cette princesse, qu’on appelait Astre, vivait avec Charmant, et quoiqu’ils eussent seize ans passés, on n’avait jamais