— Tu ne vois pas ta fille !
— Si ! D’où viens-tu, Thérèse ? Est-ce permis de commettre des sottises pareilles !
— Ne crie pas, toi ! intervint Mme Jalade. Laisse-la s’expliquer.
Thérèse, qui s’était prosternée aux pieds de sa mère parla d’une voix d’abord confuse, larmoyante :
— J’étais chez Micquemic, au-dessus de la douane. Ainsi, ce n’est pas loin.
— Qui t’aurait devinée là !… Et pourquoi nous as-tu quittés ?
— Écoute, maman. Ici je souffrais trop. On me rend responsable du malheur de Philippe.
— Mais non, pas du tout ! Quelle idée !
— Je sais bien ce que je dis… Et comment va-t-il Philippe ?
— Mieux, beaucoup mieux. Mais toi, tu dois être fatiguée ?
— Pas trop… Et si tu savais ce que Micquemic m’a raconté !…
— Tu me le diras demain. Va te coucher.
— Tout à l’heure. Écoute…
— Quoi donc ?
Tandis que Jalade, excédé par tant d’émotions, refermait les yeux, Mme Jalade, qui oubliait vite ses chagrins, caressait les cheveux, les joues encore fraiches de sa fille.
— Écoute, maman. Tu sais M. Barrière, le voisin des Ravin, celui qui a installé un si beau domaine d’horticulture ? Eh bien, c’est un voleur.
— Allons donc !
Mme Jalade étouffa un rire entre ses grosses mains.
— Où as-tu appris ces sornettes ?
— Chez Micquemic, je te l’ai dit.
— Micquemic est un fainéant qui ne trouve sans doute pas la vérité dans le vin.
— Je t’avoue, maman, qu’il m’a fourni des précisions, Sais-tu, par exemple, que M. Barrière a commencé, tout jeune, par être maçon ?
— Il me semble qu’on me l’a dit.
— Eh bien, un jour, il a découvert un trésor sous l’escalier d’un château, et il l’a emporté chez lui, sans rien révéler à qui que ce fût, et en s’imaginant que