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mes juges, ce mémoire sera l'historique exact et pur de tout ce qui tient à la question agitée. Je n'y dirai rien qui ne soit constant au procès. Les faits qui me sont personnels y seront affirmés positivement. Ce que j'ai su par le témoignage d'autrui portera l'empreinte de la circonspection ; et si ce mémoire n'a pas toute la méthode qui caractérise les ouvrages de nos orateurs du barreau, au moins il réunira le double avantage de ne contenir que des faits véritables, et de fixer l'opinion flottante du public sur le fond d'une affaire dont le secret de la procédure empêchera qu'il soit jamais bien instruit par une autre voie.

FAITS PRÉLIMINAIRES

Le 1er avril 1770, j'ai réglé définitivement avec M. Paris Duverney un compte appuyé sur des titres et sur une liaison de douze ans d'intérêts, de confiance et d'amitié.

Par le résultat de ce compte, fait double entre nous, M. Duverney resta mon débiteur, et mourut quatre mois après, sans s'être acquitté envers moi.

Son légataire universel prit des lettres de rescision contre l'acte du 1er avril, en poursuivit l'entérinement aux requêtes de l'hôtel, et fut débouté de sa demande par deux sentences consécutives.

Il en appela au Parlement, et, profitant du moment qu'une lettre de cachet me tenait sous la clef à réfléchir sur le danger des liaisons disproportionnées, il poursuivit sans relâche le jugement de son appel. Il faisait plaider, il sollicitait, il gagnait les esprits ; et moi, j'étais en prison.

Enfin, le 1er avril 1773, sur les conclusions de M. l'avocat général de Vaucresson, la cour