Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, précédées d’une notice sur sa vie et ses ouvrages.djvu/186

Cette page n’a pas encore été corrigée

Vengeance ! (Suzanne s’enfuit dans le pavillon où sont entrés Fanchette,
Marceline et Chérubin.)
Scène X
Le Comte, Figaro. (Le Comte saisit le bras de Figaro.)
Figaro, jouant la frayeur excessive.
C’est mon maître !
Le Comte le reconnaît.
Ah ! scélérat, c’est toi ! Holà ! quelqu’un, quelqu’un !
Scène XI
Pédrille, Le Comte, Figaro.
Pédrille, botté.
Monseigneur, je vous trouve enfin.
Le Comte
Bon, c’est Pédrille. Es-tu tout seul ?
Pédrille
Arrivant de Séville, à étripe-cheval.
Le Comte
Approche-toi de moi, et crie bien fort !
Pédrille, criant à tue-tête.
Pas plus de page que sur ma main. Voilà le paquet.
Le Comte le repousse.
Eh ! l’animal !
Pédrille
Monseigneur me dit de crier.
Le Comte, tenant toujours Figaro.
Pour appeler. — Holà, quelqu’un ! Si l’on m’entend, accourez tous !
Pédrille
Figaro et moi, nous voilà deux ; que peut-il donc vous arriver ?
Scène XII
Les Acteurs précédents, Brid’oison, Bartholo, Bazile, Antonio, Gripe-Soleil,
toute la noce accourt avec des flambeaux.
Bartholo, à Figaro.
Tu vois qu’à ton premier signal…
Le Comte, montrant le pavillon à sa gauche.
Pédrille, empare-toi de cette porte. (Pédrille y va.)
Bazile, bas à Figaro.
Tu l’as surpris avec Suzanne
Le Comte, montrant Figaro.
Et vous tous, mes vassaux, entourez-moi cet homme, et m’en répondez sur la vie.
Bazile
Ha ! Ha !
Le Comte, furieux.
Taisez-vous donc ! (À Figaro, d’un ton glacé.) Mon cavalier, répondez-vous à mes
questions ?
Figaro, froidement.
Eh ! qui pourrait m’en exempter, Monseigneur ? Vous commandez à tout ici, hors à
vous-même.
Le Comte, se contenant.
Hors à moi-même !
Antonio
C’est ça parler.
Le Comte, reprenant sa colère.
Non, si quelque chose pouvait augmenter ma fureur, ce serait l’air calme qu’il
affecte.
Figaro
Sommes-nous des soldats qui tuent et se font tuer pour des intérêts qu’ils
ignorent ? Je veux savoir, moi, pourquoi je me fâche.
Le Comte, hors de lui.
Ô rage ! (Se contenant.) Homme de bien qui feignez d’ignorer, nous ferez-vous au
moins la faveur de nous dire quelle est la dame actuellement par vous amenée
dans ce pavillon ?
Figaro, montrant l’autre avec malice.
Dans celui-là ?
Le Comte, vite.
Dans celui-ci.
Figaro, froidement.
C’est différent. Une jeune personne qui m’honore de ses bontés particulières.
Bazile, étonné.
Ha ! Ha !
Le Comte, vite.
Vous l’entendez, messieurs.
Bartholo, étonné.
Nous l’entendons ?
Le Comte, à Figaro.
Et cette jeune personne a-t-elle un autre engagement, que vous sachiez ?
Figaro, froidement.
Je sais qu’un grand seigneur s’en est occupé quelque temps, mais soit qu’il
l’ait négligée ou que je lui plaise mieux qu’un plus aimable, elle me donne
aujourd’hui la préférence.
Le Comte, vivement.
La préf… (Se contenant.) Au moins il est naïf ! car ce qu’il avoue, messieurs,
Je l’ai ouï, je vous jure, de la bouche même de sa complice.
Brid’oison, stupéfait.
Sa-a complice !
Le Comte, avec fureur.
Or, quand le déshonneur est public, il faut que la vengeance le soit aussi. (Il
entre dans le pavillon.)
Scène