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 le retourne.
Et vous aviez son brevet dans la poche ?
Figaro, un peu étonné
Assurément ; mais quelle enquête ? (Aux jeunes filles, )
Allons donc, jeunes filles !
Antonio, attirant Chérubin par le bras.
En voici une qui prétend que mon neveu futur n’est qu’un menteur.
Figaro, surpris.
Chérubin !… (À part.) Peste du petit fat !
Antonio
Y es-tu maintenant ?
Figaro, cherchant.
J’y suis… j’y suis… Hé ! qu’est-ce qu’il chante ?
Le Comte, sèchement.
Il ne chante pas ; il dit que c’est lui qui a sauté sur les giroflées.
Figaro, rêvant.
Ah ! s’il le dit… cela se peut. je ne dispute pas de ce que j’ignore.
Le Comte
Ainsi vous et lui ?…
Figaro
Pourquoi non ? la rage de sauter peut gagner : voyez les moutons de Panurge ; et
quand vous êtes en colère, il n’y a personne qui n’aime mieux risquer…
Le Comte
Comment, deux à la fois !…
Figaro
On aurait sauté deux douzaines. Et qu’est-ce que cela fait, Monseigneur, dès
qu’il n’y a personne de blessé ? (Aux jeunes filles.) Ah ça, voulez-vous venir,
ou non ?
Le Comte, outré.
Jouons-nous une comédie ? (On entend un prélude de fanfare.)
Figaro
Voilà le signal de la marche. À vos postes, les belles, à vos postes. Allons,
Suzanne, donne-moi le bras. (Tous s’enfuient ; Chérubin reste seul, la tête
baissée.)
Scène VII
Chérubin, Le Comte, La Comtesse.
Le Comte, regardant aller Figaro.
En voit-on de plus audacieux ? (Au page.) Pour vous, monsieur le sournois qui
faites le honteux, allez vous rhabiller bien vite, et que je ne vous rencontre
nulle part de la soirée.
La Comtesse
Il va bien s’ennuyer.
Chérubin, étourdiment.
M’ennuyer ! j’emporte à mon front du bonheur pour plus de cent années de prison,
(Il met son chapeau et s’enfuit.)
Scène VIII
Le Comte, La Comtesse. (La Comtesse s’évente fortement sans parler.)
Le Comte
Qu’a-t-il au front de si heureux ?
La Comtesse, avec embarras.
Son… premier chapeau d’officier, sans doute ; aux enfants tout sert de hochet.
(Elle veut sortir.)
Le Comte
Vous ne nous restez pas, Comtesse ?
La Comtesse
Vous savez que je ne me porte pas bien.
Le Comte
Un instant pour votre protégée, ou je vous croirais en colère.
La Comtesse
Voici les deux noces, asseyons-nous donc pour les recevoir.
Le Comte, à part.
La noce ! Il faut souffrir ce qu’on ne peut empêcher. (Le Comte et la Comtesse
s’asseyent vers un des côtés de la galerie.)
Scène IX
Le Comte, La Comtesse, assis ; l’on joue les Folies d’Espagne d’un mouvement de
marche (Symphonie notée).
Marche
Les garde-chasse, fusil sur l’épaule.
L’Alguazil. Les Prud’hommes. Brid’oison,
Les paysans et paysannes en habits de fête.
Deux jeunes filles portant la toque virginale à plumes blanches.
Deux autres, le voile blanc.
Deux autres, les gants et le bouquet de côté.
Antonio donne la main à Suzanne, comme étant celui qui la marie à Figaro.
D’autres jeunes filles portent une autre toque, un autre voile, un autre bouquet
blanc, semblables aux premiers, pour Marceline.
Figaro donne la main à Marceline, comme celui qui doit la remettre au Docteur,
lequel ferme la marche, un gros bouquet au côté. Les jeunes filles, en passant
devant le Comte, remettent à ses valets tous les ajustements destinés à Suzanne
et à Marceline.
Les paysans et paysannes s’étant rangés sur deux colonnes à chaque côté du
salon, on danse une reprise du fandango (air noté) avec des castagnettes ; puis
on joue la ritournelle du duo, pendant laquelle Antonio conduit Suzanne au
Comte ; elle se met à genoux devant lui.
Pendant que le Comte lui pose la toque, le voile, et lui donne le bouquet, deux
jeunes filles chantent le duo suivant (Air noté) :
Jeune épouse, chantez les bienfaits et la gloire
D’un maître qui renonce aux droits qu’il eut sur vous
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