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ARLEQUIN. Adieu, cousin, bon voyage ; si tu chemines toujours comme cela, les semelles de tes bottes dureront longtemps.

SCÈNE XVII

GILLES, seul. Ah ! bandits ! z’ah ! traîtres ! race de Caïn ! mais que dira mon cher maître, quand z’il verra son argent z’et sa fllle t’enlevés ? ne va-t-il pas croire que j’ai trempé dans tout ça ?

SCÈNE XVIII CASSANDRE, GILLES.

CASSANDRE. Mon voyage z’est remis z’à demain, t’et je n’en suis pas fâché z’après tout, parce que cela me donnera le temps de terminer quelques affaires.

GILLES, sans voir Cassandre. Ah ! pauvre père Cassandre, qu’allez-vous devenir ?

CASSANDRE. Que vois-je ? Gilles lié !… et que signifient ces bottes ?

GILLES. Oh ! qui que vous soyez, t’ayez pitié de moi.

CASSANDRE, effrayé, en se reculant. Oh ! serait-ce quelque lutin qui aurait pris I les habits de Gilles pour m’épouvanter ? ou, certainement, c’est ma défunte qui me joue z’encore ce tour-là !

GILLES. Oh ! non,’monsieur, c’est bien moi-même, je vous jure. CASSANDRE. Et qui t’a donc équipé de cette manière ? GILLES. Hélas ! que vous dirai-je ? ce chenapan de cousin Bridoison, qui est le plus grand coquin, monsieur, que la terre z’ait jamais porté… mon pauvre père enterré depuis huit jours… ma mère à l’agonie… Rome… le Grand Mogol… Pékin… le porte-coton de l’empereur de la Chine… Nogentsur-Seine. .. le pacha à trois queues… Isabelle… le Petit Poucet z’enfin… et que sais-je, moi ? CASSANDRE. Quel diable de galimatias me fais-tu là ? il faut qu’il soit devenu fou, z’et je ne m’étonne pas qu’on ait pris le parti de le lier. GILLES. Eh ! non, je ne suis pas fou, monsieur ; ce que je vous dis là n’est que trop véritablement vrai, z’et pour vous le couper court, Isabelle vient d’être z’enlevée. CASSANDRE. Comment ! ma fille z’enlevée ! et tu as z’une pareille action ? GILLES. Ah ! j’en souffrirais bien d’autres dans l’état z’où que je suis ; et vous-même z’enma place n’auriez pu z’empêcher qu’on n’enlevât la fille et la valise. i ASSANDRE, le prenant au colin. Comment, bourreau, ma chère valise levée f aussi !… Ah ! misérable ! tu seras pendu, is-tu dix mille vies, je te les arracherais du corps l’une après l’autre. SCÈNE XIX CASSANDRE, LÉANDRE dn » s son habit ordinaire, ISABELLE, GILLES. LÉANDRE, tenant Isabelle par la main. La constellation de l’étoile favorable de mon heureuse planète m’ayant fait z’accourir faux cris de mam’zelle, que quatre brigands voulaient forcer d’entrer dans une charrette z’au pied île Montfaucon, ma valeur z’ordinaire t’est venuez’àbout de la retirer de leurs pattes, t’et je viens, monsieur, z’avec le plus grand plaisir, la remettre entre les vôtres. CASSANDRE. Et ma valise, monsieur, ma valise ? I.EAXDRE. Mon valet z’Arlequin nous suit, et vous la rap-SCÈNE XX TOUS LES ACTEURS PRÉCÉDENTS ET ARLEQUIN, portant la valise. ARLEQUIN. Je ne sais ce qu’il y a là dedans, mais cela z’est d’une pesanteur diablement lourde. CASSANDRE à Léaudre qui aide Arlequin û se débarrasser de la valise. Ah ! monsieur, comment pourrai-je jamais m’acquitter z’envers vous d’un pareil service ? LÉANDRE. L’inclination de mon amour vous étant connue depuis longtemps, monsieur, il ne tient qu’a vous de me gratter par où ça me démange, en m’accordant l’aimable main de la charmante z’Isab Ile. CASSANDRE. Z’il y aurait de l’injustice z’à moi de vous refuser une partie de ce que je n’avais plus sans vous ; t’ainsi je vous donne z’Isabelle de tout mon cœur, et je garde la valise. ARLEQUIN’. Toujours pêche qui en prend z’un. ISAHELLE. Grand merci, mon ch’père : z’en faveur de mon mariage, je pardonne à Gilles que je comptais