Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/790

Cette page n’a pas encore été corrigée

marque, un peu sévère, sur la séparation de vos notes savantes d’avec votre texte éloquent, montre, à tout bon esprit qui sait vous apprécier, que vous êtes loin d’avoir fait tout ce qu’on a droit d’attendre d’un homme qui débute ainsi.

Après avoir parlé de la forme de votre ouvrage, dans un temps plus tranquille nous dirons quelques mots du fond. Je suis de votre avis presque sur tout ce que vous avancez ; et ce en quoi nous différons me semble abandonné au hasard des événements, plutôt que soumis aujourd’hui à des règles bien positives. Je vous félicite pour vous, en vous remerciant pour moi.

LETTRE LV,

!,..„ 

,1, I

lai !a Clef du CI, ;,

i veine raïu-lv’mclvL’

t des Sorn’crai/is

AU CITOYEN FRANÇOIS DE NEUFCHATEAU. I brumaire an VII (1 1 novembre 1798). Ministre citoyen,

Les soins constants que vous niellez pour embellir le jardin national, conservatoire dos plantes exotiques, des arbres et des animaux qui arrivent de tous los points du globe, nous prouvent que vos sages vues s’étendent à tout ce qui peut être utile au public, ou sembler digne de sa curiosité. Mais j’avoue qu’au plaisir de voir ces collections se mêle en moi un sentiment pénible, toutes les fois que j’ retrouve, au coin d’un laboratoire de chimie, dans la poussière des fourneaux, des matras, et dos matériaux servant h des distillations, le corps exhumé de Turenne, sans que je puisse m’expliquer los motifs d’un pareil dédain pour les restes d’un chef d armée que le roi le plus fier de son rang jugea digne de partager la sépulture de sa maison. <„ pont doue avoir de commun lesquclette du grand Tun nne, avec los animaux vivants que colle enceinte non-, conserve ?

Qu’aurait dit Montecucnlli, de voir son vainqueur figurer au milieu d’une ménagerie ? En cherchant s’il n’y avait point à Paris quelque dépôt moins indécent pour les restes de ce grand homme qu’un laboratoire de chimie qui nous dégradi , et non pas lui, j’ai retrouvé son tombeau, d’un grand style, au muséum de nos monuments funéraires, enclos des Petits-Augustins, où ses restes si révérés manquenl autant à son tombeau que le toml e iu manque a ces restes.

!.. marbre noir placé dessous le bas-relief de la 

bataille de Turckeim en 1075, après le pain de laquelle Turenne perdit la vie en visitant un poste dangereux, ce marbre peut être enlevé ; un cadre, des verres en sa place, laissant voir le corps du héros, commanderaient notre respect, apaiseraient I ndignation qu’on éprouve en voyanl Tun mit auprès des fœtus el des monstruosités qui altirenl la foule.

Je -m-, même très-étonné quoi, ;- ingi nieux auteurs du muséum le plus philosophique de tous, quoique dans un local mesquin, n’aient pas sollicité la cessation d’un tel scandale, en vous priant, citoj i’ii ministre, de leur confier le dépôt proi isoire des restes du grand homme dont il- ont sauvé le tombeau, en attendant que la nation lui décerne enfin des honneurs dignes de sa réputation ; eux qui, pendant que l’ignorance exaltée mutilait tous les monuments de nos artistes, ont eu la pensée courageuse de préserver, et la conception profonde de classer par suite de siècles les tombeaux des hommes puissants dont l’histoire offrirai ! le muséum moral, si l’on pouvait les y embrasser d’un

• ! oeil, comme on le l’ait aux ci-devant Augustins. 

Ce rapprochement désirable de Turenne avec son tombeau renforcerait l’un des buts si frappants qu’on sent qu’ils ont voulu remplir en compo anl leur muséum :

Celui de nous montrer par quels degrés nos sculpteurs et nos architectes sesonl élevé neur de rivaliser les grands artistes de la Grèce ; Celui d’y rappeler cette pensée philosophique, qu’avant que l’on eût érigé ce grand royaume en république, la mort seule avait le pouvoir d’y ramener los classes privilégii es à cette égalité que la république consacre :

Enfin, l’honorable but de prouvera lous l< ■ penseurs de l’Europe que la nation française esl loin de partager la barbarie qui nous a privés en peu d’heures des monuments de douze siècles. Si notre muséum central, par la réunion des chefs-d’œuvre qu’on y expose, donne un plaisir délicieux à cri qui sa ont en jouir, celui-ci nous élève à de grandes pensées ; et le désir d’y voir déposer provisoin mi ni les cendres de Turenne en est une tir-, plus moral--.

Je vous prie donc, ministre ami de l’ordre, dont la liaule magistrature est de surveiller les objets de décence publique, de prendre en considération cette remarque sur Turenne. qu’un bon citoyen vous soumet.

Je pourrais bien signer mon nom, ou mên n donner l’anagramme, si cette singularité ajoutait quelque chose au mérite d’un aperçu : qu’importe qui je sois, si je dis la véritt ’ C’est de cela seul qu’il s’agit.

LETTRE LUI.

A M. COLIN D’HARLE VILLE,

DONNÉ n

SI H

Al,l.l.’."I ;h.’l'l.

ET SI K TII.U.I I .

Pour lire un joli poëme, s’amuser d’un charmant ouvrage, il faut, mon cher citoyen, avoir le cœur serein, la tête libre ; el bien pou de <••■- doux moments sont réservés à la vieillesse I autrefois j’écrivais pour alimenter le plaisir ; et maintenant, après i iuquante ans de travaux, j’écris pour dis-