Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/763

Cette page n’a pas encore été corrigée

jet en dessous de carte malhonnête qu’on découvrira quelque jour.

J’ai l’honneur d’être, etc

Dans peu je dirai quelque chose sur la manière de recueillir et d’administrer ces secours.

LETTRE XXXIV.

En réponse à l’ouvrage qui a pour titre : Sur les actions de la compagnie des eaux de Paris, par M. le comte de Mirabeau, a ce cette épigraphe :

Pauvres gens ! je les plains : car on a pour les fous Plus de pitié que de courroux.

La Fontaine.

POUR LES ADMINISTRATEURS DE LA COMPAGNIE DES EAUX DE PARIS.

En recherchant quel est le but du véhément auteur auquel nous répondons, il semblerait que son projet est d’éclairer la commission créée par l’arrêt du conseil du 2 octobre dernier, pour régler les marchés à terme sur la valeur qu’on doit donner aux actions des eaux de Paris. Le notre à nous sera d’examiner froidement s’il est resté fidèle à cet objet, et si cette plume brillante, entièrement livrée à des joueurs connus pour avoir un grand intérêt à la baisse de ces effets, n’eût pas écrit tout le contraire, engagée dans l’autre parti.

Ô vous, pères de famille, pour qui l’auteur a l’air de s’attendrir, vous a-t-on fait accroire quelque chose ? a-t-on rien imprimé sur les actions des eaux qui pût en faire monter subitement le prix ? et ces mêmes joueurs, qui chargent du poids de leurs intérêts un homme aussi rempli de talent que de complaisance, n’ont-ils pas mis tout en usage pour avancer de quelques années le prix où l’on voit ces actions ? S’ils essayent aujourd’hui d’en provoquer la chute, c’est parce qu’ils ont des engagements connus d’en livrer beaucoup à bas prix dans un certain terme fixé. Que si nous assignons un tel but à l’ouvrage d’un homme distingué jusqu’à ce jour comme éloquent et courageux, c’est que nous osons croire que de nobles motifs n’auraient jamais permis de décrier dans un écrit public un établissement national, fruit d’un courage infatigable, sanctionné du gouvernement, et qui, s’il n’est pas encore aussi lucratif aux actionnaires qu’on peut le démontrer pour la suite, est au moins d’une utilité publique incontestable et reconnue.

En effet, l’entreprise des eaux de Paris a un caractère qui la distingue de toutes les autres spéculations : elle est établie sur un objet de consommation indispensable, et des siècles ne verront pas l’époque où ses produits cesseront de s’accroitre. Aussi ceux qui ont spéculé sur ces principes ont-ils pu porter les actions des eaux à toute la valeur où on les a vues, sans qu’on dût les accuser de folie, comme le fait M. de Mirabeau ; et si l’on osait se permettre avec lui d’adapter une épigraphe badine à une question aussi sérieuse, n’appliquerait-on pas bien à lui, à ses amis, ces autres vers de la Fontaine :

Maître renard, peut-être on vous croirait ;
Mais, par malheur, vous n’avez point de queue ?

Ici la queue dont il s’agit, c’est quelques cent actions des eaux. Voyez comment l’écrivain fonde son généreux mépris pour elles, ses conseils de n’en point acheter, sur la feinte persuasion qu’on veut engager de malheureux pères de famille à se charger d’actions à trois mille six cents livres ; sans se rappeler que beaucoup de capitalistes, obligés par état d’en savoir au moins plus que lui, en ont acquis un grand nombre à ce prix, et ne sont point du tout curieux de s’en défaire ! Ce souvenir n’eût-il pas dû le mettre en garde contre les calculs de ces joueurs, sur lesquels nous allons prendre à notre tour la licence d’argumenter ?

Où sont, dit-il, les comptes, les devis dressés par des experts instruits, par des hommes désintéressés ?… On a des aperçus : je les ai en horreur. Nous, qui n’avons pas autant que lui la grande horreur des aperçus, nous répondons qu’il n’y a point d’entreprise qui n’ait été fondée sur des aperçus. Encore faut-il offrir un tableau des travaux qu’on projette et des fruits qu’on espère, pour obtenir les fonds qu’on a dessein d’y employer : qu’ainsi les api çus ne sont ni la logique des sots, ni l’oreiller de la caresse, ni le germe de la présomption, ni tant de phrases vagues et sonores dont le sens indécis s’applique à tout et ne définit rien ; mais que nos aperçus sont ce que l’auteur appelle en d’autres termes des comptes et des devis qu’on lui eût fait voir comme à nous, s’il était comme nous intéressé dans cette affaire.

Nous convenons sans peine et sans détour que les dépenses de l’entreprise se sont éli delà des premiers devis..MM. Perrier, d’accord avec la compagnie, et par des motifs dont il— on ! rendu compte, ont cru devoir augmenter la proportion de leurs machines ; et s’ils n’ont pu prévoir d’avance le prix qu’on exigerait du terrain, la dépense des épuisements toujours exceptée des devis et marchés de constructions, enfin le prix des fers en Angleterre à l’époque de la guerre, et celui du fret de ces fers, doit-on leur reprocher durement cette augmentation dans la mise comme le fruit de leur inexpérience, de leurs mécompti di leurs fautes et de leurs tâtonnements ? D’ailleurs il n’est pas vrai que la compagnie ait dépensé quatre millions et demi : encore faut-il soustraire, des sommes employées par elle à construire, la valeur de trois cents actions, qui a payé aux actionnaires les intérêts de leurs avances jusqu’au 31 décembre 1783.

MM. Perrier ont pris l’engagement d’élever une quantité d’eau donnée avec des machines à feu qui ne consommeraient qu’une telle quantité de charbon : ils ont tenu rigoureusement parole sur