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Restaient MM. les comédiens français, qui, calculant avec chagrin la différence qui résulte pour eux de la concurrence actuelle à leur monopole passé, n’ont voulu traiter avec vous qu’au dixième de la recette pour les pièces en cinq actes, retenant huit cents livres pour les frais journaliers ; plus, les frais extraordinaires. Mais vous avez jugé, messieurs, que vous ne pouviez vous écarter de cette unité de principes qui sert de base à vos traités avec tous les autres théâtres, sans rester exposés à des réclamations, à des difficultés, à des débats sans nombre ; et vous m’avez chargé d’écrire en votre nom aux comédiens français que, sans rien changer au passé, vous continueriez tous de traiter avec eux au septième de la recette, en allouant avec équité les seuls articles de frais ci-dessus spécifiés comme à tous les autres théâtres, quelles qu’en fussent les sommes établies d’après leurs registres. Dans leur chagrin, ils oui été longtemps sans vouloir les communiquer. Enfin, les ayant obtenus, j’ai fait un long travail, dont le but pacifique était de leur prouver qu’à la différence prés d’hériter des auteurs au beau milieu de leur carrière, dont le décret du 13 janvier les avait justement privés, ils ont réellement obtenu beaucoup d’amendements en mieux sur divers articles des frais.

Les auteurs, leur dis-je, ne vous passaient depuis douze ans que six cents livres de frais par jour ; et pourtant, par les relevés de vos registres mêmes, sur tous ces articles de frais, alloués alternative ment, vous gagniez déjà, de compte fait, trente et un mille livres par an, puisque tous ces frais journaliers (les seuls qu’allouaient les auteurs, d’accord avec vous sur ce point) ne se montaient chez vous, d’après les livres de vos comptes, qu’à cent soixante-trois mille quatre cents livres, quand les auteurs vous en passaient cent quatre-vingt-quatorze mille quatre cents, en vous allouant à l’amiable six cents livres de frais par jour, et comptant l’année théâtrale alors de 324 jours.

Au lieu de six cents livres que les auteurs passaient, ils vous en ont offert sept cents, qui, calculées à trois cent cinquante jours par an, vous feront désormais une autre différence en gain de trente-cinq mille livres chaque année.

Vous gagnez les vingt mille écus de votre abonnement des pauvres.

Vous ne payez point de loyer, quand les autres spectacles en ont au moins pour trente mille livres chacun.

Vous ne payerez plus quatorze mille livres de garde extérieure, car cette exigence est injuste. La différence de ces som- / 31,000 i.} mes (en comptant comme 5 ? ,00 ° ( ,~ [(( vous comptez) bonifiera donc i l’H° 1/0 ’ (J001 votre sort, sur vos dépenses ( eo’ooo j journalières, de cent soixante-dix mille livres par an. Ces gains-là, messieurs, vaudraient mieux qu’un misérable grappillage sur le traitement des auteurs, lequel ne ruai pus mille crus, et peut amener votre ruine.

Si vos recettes sont diminuées par les événements actuels, c’est un mal passager que les auteurs partagent avec vous. Ce n’est point sur leur soit modeste que vous pouvez réparer ce malheur. Quand vous annuleriez leur entier traitemenl à tous, il est trop disproportionné pour entrer en ligue de compte avec les gains puissants que vous regrettez justement.

Eh ! ([ne ferait leur sacrifice entier, lorsqu’il est démontré que (sept cents livres de frais levées) deux mille cent livres de recette par jour vous donneront un produit net, par an, de quatre cent quatre vingt-dix mille livres, dans lequel produit les auteurs ne peuvent jamais entier en masse que pour dix-sept mille six cents livres qu’ils se partagent entre vingt-trois : ce qui doit produire à chacun sept cent soixante-cinq livres par an, quand vous aurez pour chaque part vingt mille cinq cent trente-neuf livres ?

Si, au lieu de lever sept cents livres de frais, vous en voulez prendre neuf cents : au lieu de deux cent quarante-cinq mille livres par an, vous lèverez alors trois cent cinquante fois neuf cents livre-, ou trois cent quinze mille livres. Suivant votre façon de compter, dont je vous prouverai le vice, la différence en plus, pour vous, sera de soixante-dix mille livres. Mais comme les auteurs ne partagent que sur le pied du neuvième dans le tiers, qui est le vingt-septième, vous ne retrancherez sur la part des mêmes auteurs que le neuvième du tiers des frais, qui n’est aussi qu’un vingt-septième. Et c’est donc pour leur arracher ce vingt-septième de soixante-dix mille livres par an, ou deux mille cinq cent quatre-vingt-douze livres sur leurs dix-sept mille six cents livres, que vous vous obstinez à refuser leurs offres ! car tout le reste porte sur vous. Remarquez bien cela, messieurs : tout h restt porte sur vous ! Voyez si deux mille cinq cent quatre-vingt-douze livres de plus ou de moins par an, dans une recette présumée de sept cent trente-cinq mille livres, peuvent entrer en considération avec le mal affreux de vous séparer des auteurs : daignez comparer avec moi le résultat des deux décomptes, et jugez qui doit en rougir !

Si les vingt-trois auteurs faisaient ce sacrifice, les dix-sept mille six cents livres qu’ils se partagent entre vingt-trois, réduites alors à quinze mille huit livres, ne laisseraient plus à chacun, au lieu de sept cent soixante-cinq livres, que six cent cinquante-trois livres par an ; c’est presque le huitième que vous leur ôteriez, lorsque cette différence, si c’est vous qui la supportez, n’est qu’un cent quatre-vingt-troisième de diminué sur votre sort. Au lieu de vingt mille cinq cent trente-neuf livres, vous ne toucherez plus chacun que vingt mille quatre cent vingt-sept livres ; c’est cent douze livres de moins, par an, à chaque comédien français. Pour les au-