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sembler MM. les premiers gentilshommes de la chambre, vos confrères, et de m’admettre à plaider devant eux l’exécution du nouveau règlement pour le Théâtre-Français. Depuis deux ans et demi cette affaire est remise de mois en mois, quoique avec toute la politesse et les égards qui soutiennent la patience.

« Mais comme à la fin la volonté se montre, même à travers les procédés qui la dissimulent, je suis obligé de revenir à l’opinion générale, et de croire que vous n’avez jamais eu le dessein sérieux de nous faire faire cette justice que vous nous aviez tant promise.

« Remettant donc l’affaire au point où elle était le jour où vous m’avez fait l’honneur de m’en parler pour la première fois, je vous prie de vouloir bien me rendre la parole que je vous donnai, de ne point inquiéter les comédiens sur le compte qu’ils ont à me remettre.

« Mon intention est de donner aux pauvres tout ce qui m’est dû au théâtre, et de faire poserjudiii clairement des bornes au déni de jusl « les comédiens font aux auteurs. Mes droits sévèrement liquidés dans les tribunaux, en faveur des pauvres, serviront de modèle au compte que chaque homme de lettres a droit de demander aux comédiens.

« Vous voudrez bien, monsieur le maréchal, me rendre le témoignage que j’ai fait tout ce que j’ai pu pour prévenir cet éclat ; et toutes les pièces justificatives de la conduite des auteurs depuis deux ans montreront au public que ce n’est qu’après avoir vainement épuisé toutes les voies conciliatoires que je me suis déterminé avec chagrin à prendre celle d’une discussion juridique.

« Je suis avec le plus profond respect, etc. »

Le 4 août, je reçus la réponse suivante :

« J’ai reçu, monsieur, la lettre que vous avez pris la peine de m’écrire, et je vous avoue que j’ai été un peu étonné du reproche qu’elle contient, puisque vous me paraissez douter de la bonne foi avec laquelle je me suis conduit, et du désir que j’avais de terminer tous les différends qui s’étaient élevés entre vous et la Comédie, et même de faire un arrangement général qui pût éviter toute discussion par la suite avec messieurs les auteurs, ■)<■ vous ai instruit de ce qui s’était passé entre mes camarades et moi, quand je leur ai fait part du projet que vous aviez bien voulu me confier, et je vous ai prié d’en conférer avec M. le maréchal de Richelieu. « Des affaires personnelles et plus importantes vous ont éloigné de Paris ; et mon service auprès du roi m’a retenu ici depuis le I er jan ■ « avoir été à Paris. Je n’ai reçu de vous ni de personne, depuis cette époque, aucune lettre ni aucune proposition. Je n’ai pas douté que vous n’eussiez remis celle affaitf, ou q le vous ne vous en fussiez entretenu avec M. de Richelieu, qui est plus au fait que moi des difficultés qui sont présentées.

« Il me semble même avoir ouï dire que parmi MM. les auteurs plusieurs s’étaient récriés contre l’arrangement. Au surplus, monsieur, vous êtes à portée de vous en éclaircir auprès de M. de Richelieu. Mon service ne me permettant pas d’aller à Paris, je ne serai pas en position de les suivre.

« Quant à vos demandes particulières avec la Comédie, j’en ignore le détail : il me semble qu’il y aurait des moyens de vous concilier. Établissez vos droits : les comédiens vous répondront après les avoir examinés : si vous êtes content de leurs réponses, il n’y aura pas matière à procès : si vous n’êtes pas satisfait, vous aurez toujours la ressource que vous proposez aujourd’hui. » Pourquoi venir d’abord à un éclat qui ne peut aller qu’au détriment de ce spectacle, qui n’est déjà que trop en désordre ? Vous êtes trop honnête pour saisir un moment où la fermentation est plus forte que jamais parmi eux. Voilà, ■ monsieur, ce que je pense.

c J<— finis en vous priant de rendre désormais plus de justice à ma façon de penser, et de me croire incapable de cette basse dissimulation qui, dans tous les points, est indigne de moi. Je suis très-parfaitement, monsieur, votre, etc.

Signé le maréchal de Duras. »

J’ai eu depuis plusieurs occasions de juger que M. le maréchal de Duras avait réellement conservé sa bonne volonté pour les auteurs ; mais alors je ne vis dans sa réponse qu’un inconcevable oubli du passé, soutenu d’un renvoi à cent ans pour l’avenir.

Bien résolu d’assigner les comédiens, et la tête échauffée de me voir outrageusement soupçonné d’une part et payé de l’autre par un déni formel de justice, j’adressai sur-le-champ 7 aoûl 177 à M. le maréchal la réponse suivante, de la chaleur de laquelle je lui ai fait sincèrement mes excuses, lorsque j’ai cru depuis reconnaître qu’il ne nous ssuyer que les contradictions qu’il éprouvait lui-même :

i Monsieur le Maréchal,

« La lettre dont vous m’avez honoré est la preuve la plus complète que l’affaire des auteurs dramatiques est malheureusement sortie de votre mémoire ; et je dis de votre mémoire, parce que le reproche que vous me faites de partager l’inquiétude de mes confrères sur vos dispositions à les obliger ne me permet plus d’en douter. « Lisez donc, je vous prie, monsieur le maréchal, avec attention la rapprochement de toutee u qui s’est passé sur cette affaire ; et vous vous