« Il vous prie d’agréer l’hommage de son profond respect.
« Ce 14 septembre 1792.
Renvoyé à la commission des armes et au comité militaire réunis, pour en faire l’examen et le rapport incessamment.
Ce renvoi à la commission, lequel ne se fit point attendre, me combla déplaisir. Je le reçus le 13, et le 15 j’écrivis aux comités militaire et des armes réunis :
« Ce 1S septembre 1792.
« Messieurs,
« L’Assemblée nationale m’ayant fait la faveur de renvoyer ma pétition à votre équitable examen, j’attends vos ordres pour me rendre où il vous plaira me mander. Si j’osais former quelque vœu, ce serait, ô mes juges, que votre assembléi fùtnombreuse, et que le ministre des affaires étrangères daignâts’y rendre aussi comme contradicteur. « Agréez les respects du vieux inutile. « Signé Beaumarchais. »
Deux heures après, la commission des armes me fit la réponse suivante :
« Taris, le 15 septembre 1702, l’an IV de la liberté et le 1er de l’égalité.
« La commission des armes me charge de vous prévenir, monsieur, que, d’après le renvoi qui lui est fait de votre pétition par décret de l’Assembi i nationale, elle entendra avec plaisir ce soir, à huit heures, les objections que vous vous proposez de lui soumettre sur l’affaire des fusils que vous avez négociée en Hollande.
« Le secrétaire-commis de la commission des armes,
« Signé Teugère. »
Voilà, me dis-je en la lisant, comme on fait marcher les affaires ; et non à la façon de messieurs nos ministres, qui, pour chaque incident, vous font perdre quinze jours et courir trente lieues, sans jamais finir sur rien ! Je me rendis le soir arec mon portefeuille aux deux comités réunis. Mais le ministre n’y vint pas pour être mon contradicteur, comme je l’avais instamment demandé.
Mon seul exorde fut prononcé. Du reste, je ne fis que lire tout ce que j’ai mis sous vos yeux. Je lus, parlai pendant trois heures ; le lendemain, pendant une heure et demie. Lecointre, vous seul y manquiez (j’en excepte M. Lebrun) ; vous étiez alors aux frontières, et je vous regrettai beaucoup.
Quoi qu’i ! en —oit, moi retiré, ces messieui 3 corn posèrent l’attestation très-honorable que je vais insérer ici. après qu’ils eurent reçu le compte rendu par deux de leurs membres, qu M— députèrent au ministre Lebrun, lesquels exigèrent ses promesse— —/< me remettre, le lendemain au soir, toul ce qu’il me fallait pour aller délivrer les armes. Je m’y étais rendu de mon coté. Les commissaires dirent au ministre « que les deux comités, « chargés par un décret de l’Assemblée nationale « d’examiner très-sévèrement ma conduit dans " cette affaire, l’avaient trouvée irréprochable et sur « la ferme et sur le fond ; qu’en conséquence ils « étaient chargés parles deux comités, au nom de l’Assemblée, de lui dire que leur mission était « d’obtenir sa parole de me mettre au plus tôt en » état île partir, puisque je consentais à faire le « sacrifice d’un tel déplacement, ci mon âge, et « malade. «
J’expliquai au ministre que ce qu’il me fallait était un ordre à M. de Maulde d’exécuter le traité du 18 juillet, dans la partie qui le concerne ; ta remise du cautionnement, sans lequel tout le reste était bien inutile ; un passe-port pour moi, un pour M. laHogue, et les fonds que la guerre pourrait me remettre sans gêner le département. M. Lebrun promit a ces messieurs qu’au plus tard pour demain au soir j’aurais ce qu’il faut pour partir. (Ne perdez pas de vue, lecteur, cette promesse. Vous allez voir comment on l’accomplit. C’était h’Mi septembre. Je fus le soir aux comités ; mais ce ne fut que le 19 que le secrétaire me remit l’attestation signée que l’on va lire: « Les membres composant le comité militaire el la commission des armes attestent que, sur le renvoi qui leur a été fait, par l’Assemblée nationale, le I i du courant, de la pétition du sieur Caron Beaumarchais, relative c un achat de soixante mille fusils fait par lui en Hollande, au mois de mais dernier, il en résulte que ledit sieur Beaumarchais, qui nous a exhibé toute sa correspondance, a montré, sous les divers ministres qui se sont succédé, le plus grand zélé et le plus grand désir de procurer à la nation tes armes retenues en Hollande par le ? entraves dues à la négligence ou à la mauvaise volonté du pouvoir exécutif régnant sous Louis XVI; et que, d’après les conférences qu’il a eues avec le ministère actuel, en présence de deua commissaires pris dans le scindes deux comités réunis, le sieur Beaumarchais est dégagé de tout embarras, et mis dans la position heureusede fournir à la nation les soixante mille fusils.
« Sur quoi les soussignés déclarent que ledit sieur Beaumarchais doit être protégé dans l’entreprise du voyage qu’il se propose de faire pour ledit objet des armes, comme étant dirigé par le seul motif de servir la chose publique, et méritant à cet égard la reconnaissance de la nation.