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sion qui dans ce cas ne présente autre chose que le succès obtenu par le plus fort sur le plus faible, attribué à une volonté particulière de la Divinité : droit abusif, et qui serait détruit par les premiers efforts puissants d’un révolté, lequel, écrasant l’oppresseur, pourrait prétendre avoir acquis un droit également émané de Dieu, jusqu’à ce que le prince, retrouvant son avantage dans la supériorité d’une force nouvelle, acquît de nouveau, en soumettant le rebelle à son tour, ce prétendu droit de Dieu qui n’est, comme on le voit, que le barbare droit du plus fort, ou du conquérant sur les vaincus, et ne peut jamais être un droit du roi sur des propres sujets.

On ne doit pas dire non plus que le roi ne tient son droit que de son épée :

1o Parce que ce droit de l’épée, du conquérant, n’est pas plus un droit que celui qu’on prétend tenir de Dieu ; c’est le même, et je viens d’en montrer le cercle vicieux.

2o Parce que le conquérant, ne pouvant acquérir le droit qu’il dit tenir de son épée qu’en employant celles de ses sujets, que la sienne ne représente qu’au figuré, ce terrible droit de l’épée appartient, au positif, à la nation conquérante qui prête son épée à son souverain. Il ne s’exerce au plus que sur les vaincu, mais ne peut nullement se rétorquer par le le souverain contre la nation même qui l’a aidé à conquérir.

Ainsi Alexandre aurait mal raisonné (le prétendre asservir la.Macédoine, qu’il tenait il i droit de h., , et de Cépée, parce qu’il avait conquis la Perse et llnde à la tête et par l’épée des Macédoniens —es sujets. Donc, d’un roi juste à ses sujets, le dt étant le même que L •’[ ne représente droit du plus fort, n’est point du tout un droit, puisqu’il peut passer successivement à tous les partis qui auront eu l’art de se rendre les plus forts. Ce droit absurde ne fait que contraindre sans engager, sans jamais obliger ; ce qui est en tout i

I lée, non sur la force, mais sur la justice : au qui engage et oblige tous les sujets envers le prince aux liions justes, raisonnables et sacrées, qui engagent à leut’tour le prince envers ses sujets, et justement nommées, à ce titre, lois fondamentales du * oyaumt’. ni doivent toujoursexis ter en un lieu stable et sûr ; leur maintien et leur exécution être confies à la garde d’un corps de dépositaires indestructibles (quels qu’ils soient, préposé à la conservation constante du contrat qui fait la sûreté du prince ci de son peuple : et voilà d’où naît le principe, autant disputé que peu connu, de l’inamovibili rats.

L’inamovibilité des magistrats n’est donc point un prila magistrature, mais un bien sacré, appartenant en propre à la nation entière, composée du prince et de son peuple.

si |.s magistrats pouvaient être destituantes à volonté : si, pour consommer l’injustice, le plus fort avait la ressource de destituer les magistrats qu’il n’aurait pu corrompre ; s’il pouvait rompre ainsi la barrière qui sépare l’injuste, en ôtant au faible les seuls magistrats qu’il lui importait de conserver, à savoir, les magistrats incorruptibles, les seuls conservateurs des lois, il lit plus d’autre lien de la société, d’autre soutien de l’État, que l’absurde droit du plus fort, également i au peuple. Voilà le vraifonde I inamovibilité. ture.

Selon le droit divin, le dn it d i lui des na. J’userai dire, comme le grand Voltaire dans ses î

Le plus beau titre a la couronne du roi qui nous gouverne

est de la tenird’une succession de soixante-cinq rois ses ancêtres. » tions, et i r le plus grand avantage des i peuples, tout homme qui a reçu le caractèn magistrat, soit qu’il le tienne ou du prier, , ou e

; les deux à la fois, est un homme national et 

publie, dont il importe à tous que la fonction soit constante, indestructible, inamovible enfin, à n par mort, démission volontaire, roi ] i. ment, il ne soit enlevé a cetti

Selon iiei. voilà les principes : lous les exemples pour ou contre ne sont qui d i] „— a q Ue les qui puissent avoir ici une véritable autorité. APPJ

Dans l’état présent des affaires 1, on ne rétablirait point du tout le principe fondamental m rappelant les anciens magistrats, on leur donnait de nouvelles provisions ; ot umettait à cette risible inamovibilité sous le sceau do laquelle les nouveaux magistrats ont siégé au pal no doivent recevoir aucun ordre, que celui de actions, qui ne ]

que suspendues, mais jamais am

Le principe d, — l’inamovibilité une lois reconnu, celui de lu liberté des délibérations en dérive, en i >1 quence nécessaire. Si les magistrats sont préposés au i la conservation de— bas. l’examen qu’ils font avant l’enregistrement de tous le— édits du roi ne poui d autre lait que de connaître si l’édil est conforme ou contraire aux lois qu’ils ont juré de i orte nécessairement la liberté

cussion et celle des suffrages..Mai— cette liberi renfermée dans des bornes très-faciles à poser, si don côté elle donne le droit aux m e erver], ]e remontrer au roi, elle ne va pas jusqu’au droit de s’opposi i aeii’e. U e, a aux volontés l par des cessations de service, des arrêts de défense, etc. : ister un tel ordre de ch

que moi, en >yen, je me trouve froissé entre l’éd qui m’ordonne de paver, sous peine de punition, et l’arrêt du parlement qui me défend de payer, sous les mêmes reines.

Il ne peut y avoir, dans tout Etat monarchique, qu’une seule puissance active et executive, qui est i la puissance des magistrats n’est que passive et r — ■ m’e i a même que consiste

Le roi veut passerunédit, cet édit e.-t juste ou injuste. Si les magistrats ne croient pas, en conscien la— la sanction de l’enregistrement qui lui coni quand ils ont d

remontré, refusé d’enregistrer, résisté aux letti esdi lésion, si le roi va plus loin, le ministère du magistrat est fini : tout ce qu’il ferait au delà serait séditieux, et tendrait à la rébellion.

Le seul refus des magistrats de concourir au mal, en respectant l’autorité du roi, même lorsqu’elle s’égare est toujours suffisant pour arrêter le mal, ou du moins l’empêcher de s’accroître. Mais ce refus et leur inaction fussent-ils insuffisants, le magistrat ne peut aller plus loin sans désobéissance et sans révolte. Il en résulte seulement que le roi, ayant fait d’autorité une chose contraire aux lois, ne peut plus invoquer le concours de ses tribunaux pour la faire exécuter. La force l’a créée, la force doit la maintenir : c’est alors l’affaire des soldats du roi, et non celle de ses magistrats, qui ne peuvent ni ne doivent connaître d’aucune discussion relative à l’acte qu’ils n’ont pu légalement reconnaître.

1774