de mon titre, et les explications que je suis prêt à vous donner sur les motifs de son existence, vous porteront à prévenir, par un arrangement à l’amiable, des demandes juridiques, auxquelles je ne me détermine jamais qu’à la dernière extrémité.
« J’ai l’honneur d’être, etc.
Que répondit à ces invitations le légataire universel, devenu si fier de son nouveau titre ?
« La seule proposition que je puisse accepter, monsieur, est celle que vous me fîtes, il y a quelque temps, de faire remettre chez Me Mommet, votre notaire, vos titres et lettres à l’appui, en originaux, afin que je puisse les examiner moi-même et en prendre connaissance. Toute entrevue deviendrait inutile, et ne conduirait à rien avant ce travail. Je croyais m’en être expliqué assez clairement dans ma dernière, etc… (Il est fier, notre ennemi !) J’ai l’honneur d’être, etc.
Elles existaient donc en octobre 1770, ces lettres en originaux, à l’appui de l’acte, puisque le fier légataire avoue dans sa lettre du 31 que, depuis quelque temps, je lui avais offert de les soumettre à son examen chez mon notaire ? J’offrais donc aussi tous les éclaircissements possibles ?
— Il n’y a plus moyen, à la vérité, de douter que les lettres n’existassent ; mais il est possible encore, à la rigueur, que M. de la Blache ne les ait pas vues avant les procédures.
— Je sais bien, messieurs, qu’il le nierait, s’il osait ; mais comme je n’ai pas le temps de lui en laisser le loisir, que ce n’est pas sans preuves que je l’ai dit, et que ses premiers mémoires l’attestent, je le répète : oui, messieurs, il les a vues, lues, tenues et relues avant le procès, chez mon notaire, le mardi 6 novembre 1770, et c’est encore lui-même qui va vous le prouver. J’avais écrit à ce seigneur, le 6 novembre au matin :
« Mon titre de créance est chez Me Mommet, monsieur : je le lui avais remis avant de vous écrire ma dernière lettre, où je croyais m’en être expliqué assez clairement (phrase du légataire dont je me parais aussi : à fiérot, fier et demi). Si la crainte de m’y rencontrer vous a empêché d’en aller prendre communication, vous le pouvez toute la soirée aujourd’hui : Me Mommet m’a promis de vous y attendre, etc… Avec des procédés un peu plus honnêtes, vous auriez obtenu de moi des éclaircissements de toute nature ; mais peut-être avez-vous vos raisons pour ne pas vous soucier de les recevoir.
« J’ai l’honneur d’être, etc.
Et que répond l’héritier, bouffi de colère à l’aspect d’un créancier de quinze mille francs, dans un héritage de quinze cent mille francs, tombé du ciel ? Il me répliqua à l’instant :
« Quoique je ne me croie point obligé, monsieur, de répondre à votre empressement sur la connaissance que vous désirez depuis si longtemps que je prenne de votre titre de créance, je passerai ce soir chez votre notaire pour en examiner la teneur, etc… quant aux éclaircissements que j’y aurais gagnés (à m’y voir), et dont vous me flattez, ne voulant rien obtenir, il était assez simple de ne rien demander, etc.
« Je suis très-parf…, etc.
Il y alla le soir même ; et pour mieux procéder à l’avération des écritures, il y mena le sieur Dupont, depuis intendant de l’École militaire, alors exécuteur testamentaire de M. Duverney, et qui, ayant été toute sa vie son secrétaire, connaissait bien son écriture ; il y mena le sieur Du Coin, caissier de M. Duverney, qui la connaissait bien autant ; il y mena d’autres personnes encore, non une fois, mais plusieurs. Me Mommet leur montra l’acte et les lettres en original : là, tout fut examiné, bien lu, commenté par le noble héritier, mais avec des éclats, avec une fureur qui le mena jusqu’à dire « que si j’avais jamais cet argent, dix ans se seraient écoulés, et que j’aurais été vilipendé de toute manière auparavant ! »
Depuis, et sous l’époque du 11 décembre 1770, Me Mommet, à ma prière, eut encore l’honnêteté de porter l’acte et les lettres en original avec un mémoire explicatif chez Me d’Outremont, avocat de ce riche légataire, son conseil y étant assemblé : ce qui est aussi constaté par deux lettres de l’adversaire et de moi. Et c’est d’après son examen critique et celui de tant de connaisseurs, que je l’ai pressé de toutes les façons de prendre contre l’acte du 1er avril la voie de l’inscription de faux, la seule qui légalement lui fût ouverte, et c’est d’après ces examens aussi qu’il l’a toujours éludée, voulant bien, comme je l’ai dit, me dénigrer publiquement, pourvu qu’il ne courût pas le danger de m’accuser juridiquement ; et l’on veut que je me modère !… Il le faut cependant.
Que résulte-t-il de tout cela, très-gracieux soussignés ? C’est que des lettres vues longtemps avant le procès entamé n’ont pu être fabriquées, comme il vous le fait dire, longtemps après le procès entamé ; c’est que toutes ces lettres, que j’ai, dit-il, forgées après coup pour me tirer d’un mauvais pas où les mémoires et les bruyants plaidoyers du porte-voix Caillard me jetaient en 1772, je viens de prouver qu’il les avait connues et très-aigrement commentées dès 1770, c’est-à-dire deux ans avant les