Scène XVII
Monseigneur, arrêtez ! qu’on ne les marie pas : je viens payer madame avec la dot que ma maîtresse me donne.
Au diable la maîtresse ! Il semble que tout conspire…
Scène XVIII
Ah ! oui, payer ! Tiens, tiens.
J’en vois assez : sortons, mon oncle.
Non, s’il vous plaît. Que vois-tu donc ?
Ma bêtise et ta lâcheté.
Pas plus de l’une que de l’autre.
Et que tu l’épouses à gré, puisque tu la caresses.
Je la caresse ; mais je ne l’épouse pas.
Vous êtes bien insolent d’oser me retenir !
C’est-il ça de l’amour ! Avant de nous quitter, je t’en supplie, envisage bien cette chère femme-là.
Je la regarde.
Et tu la trouves …
Affreuse.
Et vive la jalousie ! elle ne vous marchande pas.
Embrasse ta mère, ma jolie Suzannette. Le méchant qui te tourmente est mon fils.
Vous sa mère !
C’est donc de tout à l’heure ?
… Que je le sais.
Non, mon cœur entraîné vers lui ne se trompait que de motif ; c’était le sang qui me parlait.
Et moi le bon sens, ma mère, qui me servait d’instinct quand je vous refusais : car j’étais loin de vous haïr, témoin l’argent…
Il est à toi : reprends ton billet, c’est ta dot.
Prends encore celle-ci.
Grand merci.
Fille assez malheureuse, j’allais devenir la plus misérable des femmes, et je suis la plus fortunée des mères ! Embrassez-moi, mes deux enfants ; j’unis en vous toutes mes tendresses. Heureuse autant que je puis l’être, ah ! mes enfants, combien je vais aimer !
Arrête donc, chère mère ! arrête donc ! voudrais-tu voir se fondre en eau mes yeux noyés des premières larmes que je connaisse ? Elles sont de joie, au moins ! Mais quelle stupidité ! j’ai manqué d’en être honteux : je les sentais couler entre mes doigts : regarde ; (Il montre ses doigts écartés) ; et je les retenais bêtement ! Va te promener, la honte ! je veux rire et pleurer en même temps ; on ne sent pas deux fois ce que j’éprouve.
Ô mon ami !
Mon cher ami !
Eh bien ! moi, je suis donc bê-ête aussi !
Chagrin, c’est maintenant que je puis te défier ! Atteins-moi, si tu l’oses, entre ces deux femmes chéries.
Pas tant de cajoleries, s’il vous plaît. En fait de mariage dans les familles, celui des parents va devant, savez ! Les vôtres se baillent-ils la main ?
Ma main ! puisse-t-elle se dessécher et tomber, si jamais je la donne à la mère d’un tel drôle !
Vous n’êtes donc qu’un père marâtre ? (À Figaro.) En ce cas, not’galant, plus de parole.
Ah ! mon oncle…
Irai-je donner l’enfant de not’sœur à sti qui n’est l’enfant de personne ?
Est-ce que cela-a se peut, imbécile ? on-on est toujours l’enfant de quelqu’un.
Tarare !… Il ne l’aura jamais.