Page:Beaumarchais - Œuvres choisies, édition 1913, tome 2.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée


ROSINE. La sixième…

BARTHOLO. Je vois bien qu’elle n’y est pas, la sixième.

ROSINE, baissant les yeux. La sixième ? Je l’ai employée à faire un cornet pour des bonbons que j’ai envoyés à la petite Figaro.

BARTHOLO. A la petite Figaro ? Et la plume qui était toute neuve, comment est-elle devenue noire ? Est-ce en écrivant l’adresse de la petite Figaro ?

ROSINE, à part. Cet homme a un instinct de jalousie !…

(Haut.) Elle m’a servi à retracer une fleur effacée sur la veste que je vous brode au tambour.

BARTHOLO. Que cela est édifiant ! Pour qu’on vous crût, mon enfant, il faudrait ne pas rougir en déguisant coup sur coup la vérité ; mais c’est ce que vous ne savez pas encore.

ROSINE. Eh ! qui ne rougirait pas, Monsieur, de voir tirer des conséquences aussi malignes des choses le plus innocemment faites ?

BARTHOLO. Certes, j’ai tort. Se brûler le doigt, le tremper dans l’encre, faire des cornets aux bonbons pour la petite Figaro, et dessiner ma veste au tambour ! quoi de plus innocent ?

Mais que de mensonges entassés pour cacher un seul fait !…

Je suis seule, on ne me voit point ; je pourrai mentir à mon aise. Mais le bout du doigt reste noir, la plume est tachée, le papier manque ! On ne saurait penser à tout. Bien certainement, signora, quand j’irai par la ville, un bon double tour me répondra de vous.




Scène