l’exil aux Bermudes, la prison ou la confiscation de leurs propriétés. Inutile de vous dire que le capitaine Marion de Contrecœur fut au nombre de ceux qui furent signalés à la vengeance des autorités. Un mandat d’arrestation fut lancé contre tous les patriotes qui avaient pris part à la bataille de Saint-Denis ou qui s’étaient déclarés ouvertement en faveur de l’insurrection armée. Je me trouvais donc aussi au nombre de ceux qui avaient tout à craindre de la part des tribunaux anglais. Comme la plupart de mes camarades, je me préparais à prendre la route des États-Unis, quand le soir avant mon départ je reçus la visite du capitaine Marion. Je m’étonnai de le voir, car je le croyais déjà parti. Ma femme pleurait en veillant à mes préparatifs de départ, et j’essayais de la reconsoler. Le capitaine me prit à part et me dit :
— Girard, j’ai reçu aujourd’hui la visite de mon père qui habite Lanoraie. Le brave homme ayant appris la part importante que nous avons prise à l’engagement de Saint-Denis est venu m’offrir asile dans sa propre maison. Il prétend que j’y serai en parfaite sûreté. Maintenant, mon ami, j’ai voulu te consulter avant de rendre une réponse à mon père et j’ai voulu t’offrir de partager mon lieu de retraite, si tu crois qu’il soit prudent de rester à Lanoraie. Qu’en dis-tu ?