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Il est donc certain que l’esprit d’entreprise des capitalistes américains qui ont construit ces nouvelles lignes a été l’une des causes principales qui ont produit le mouvement général d’émigration franco-canadienne vers les États-Unis. Les différentes administrations canadiennes, trop occupées d’une politique toute d’égoïsme, reléguaient au second plan la nécessité des chemins de fer et des établissements industriels, et les États-Unis acquéraient peu à peu la première place parmi les nations manufacturières du monde entier. Ce n’est pas le manque de patriotisme qui pousse l’émigrant canadien vers les États-Unis ; ce n’est pas l’amour exagéré des richesses ni l’appas d’un gain énorme ; c’est une raison qui prime toutes celles-là : c’est le besoin, l’inexorable besoin d’avoir chaque jour sur la table le morceau de pain nécessaire pour nourrir sa famille ; et c’est vers le pays qui fournit du travail à l’ouvrier que se dirige naturellement celui qui ne demande qu’à travailler pour gagner honnêtement un salaire raisonnable qui lui permet de vivre sans demander l’aumône. Quelques journalistes du Canada et des États-Unis ont prétendu que la misère régnait parmi les Canadiens-Français émigrés, mais la logique des faits est là pour prouver le ridicule de ces assertions fantaisistes. La preuve irréfutable du contraire se