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les nouvelles qui nous arrivent sont très favorables. On manque de bras dans les manufactures et les ouvriers et les ouvrières sont reçus et traités avec bonté. C’est du moins ce que nous écrit notre fils aîné qui depuis un an travaille aux États-Unis.

Le fermier, tout en poursuivant ses travaux avait prêté l’oreille aux paroles de sa femme, et son cœur avait été touché de pitié en apprenant la position difficile de la jeune fille. Poussé par l’intérêt qu’il commençait à éprouver pour ses malheurs, il lui demanda :

— Comment vous nommez-vous, mademoiselle ?

— Jeanne Girard, monsieur ; pour vous servir.

— Girard !… Girard… mais seriez-vous par hasard la fille du vieux patriote, M. Girard, mort il y a quelques jours d’une attaque d’apoplexie ?

— Précisément, monsieur, je suis la fille de Jean-Baptiste Girard.

— Et vous vous trouvez seule, dans la misère, sans amis pour vous consoler, sans protecteur pour veiller à vos besoins ? Mais, mon enfant, votre position est en effet fort critique, surtout si votre frère ne revient pas avant le printemps prochain.

— Oui, monsieur ! mon frère est dans les « chantiers » et il m’est impossible de lui faire connaître