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d’aller gagner là-bas, avec les secours de ma famille, la somme nécessaire pour payer les dettes qui se sont accumulées sur mes bras depuis trois ou quatre ans. Croyez-en mon expérience : si vous vous trouvez dans la nécessité de travailler pour vivre, suivez notre exemple et prenez la route des États-Unis. Qu’en penses-tu femme ? continua-t-il en s’adressant à son épouse qui était occupée à emballer des articles de ménage dans une énorme caisse.

— Ma foi, mon enfant, répondit la fermière avec bonté, je crois que ce que mon mari vous dit là est bien la vérité. Nous en avons la preuve par nous-mêmes, puisque nous partons lundi prochain pour Fall River, dans l’état du Massachusetts, afin de pouvoir travailler dans les manufactures. Je n’aimerais pas cependant à me permettre de vous aviser sur un sujet aussi délicat. Vous avez une famille, ici, n’est-ce pas, qui saura mieux que nous, vous donner de bons conseils ?

— Hélas ! non, madame ! je suis orpheline, sans parents, sans amis. Mon père est mort, il y a quelques jours, et mon seul frère se trouve à hiverner dans les « chantiers. »

— Pauvre enfant ! continua la brave femme que la figure mélancolique de Jeanne avait intéressée, pauvre enfant ! Et vous espérez pouvoir trouver