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rait impossible en restant au village. Pourquoi ne partirais-je pas avec lui ? Son expérience me guidera et je vous reviendrai le printemps prochain, le gousset rempli de belles pièces d’or. Inutile de vous dire que je ne vous quitterai qu’avec regret, mais comme la nécessité me forcera quand même à m’éloigner du village, il me semble que je ne saurais mieux faire que de suivre mon ami. Qu’en dites-vous ?

— Ma foi ! mon fils ! je crois que tu as raison. Le travail, à la campagne, devient de plus en plus difficile à obtenir et malgré les regrets que nous éprouverons, ta sœur et moi, en te voyant partir, nous comprendrons que ton absence est absolument nécessaire.

— Merci, mon père. Et toi, petite sœur, qu’en penses-tu ? continua Jules en s’adressant à Jeanne.

La pauvre enfant qui s’était tenue à l’écart pendant la conversation, avait appris avec une douleur facile à comprendre le départ de son amant. Mais sa raison lui disait que ce départ était devenu inévitable devant l’assentiment de son père, et que Jules lui-même se verrait forcé, tôt ou tard, à s’éloigner de la famille pour pourvoir à ses besoins. Le vieillard était d’un âge où tout travail lui était devenu impossible, et elle-même ne pouvait que faire bien peu pour le soutien de ses vieux jours.