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son mariage avec une Girard de Contrecœur. Voilà mon dernier mot !

Et le vieillard épuisé s’était laissé tomber dans un fauteuil. Pierre pâle mais ferme, avait écouté avec respect les paroles de son père. Il avait été d’autant plus surpris de cet accès de colère, que la scène du matin lui avait fait croire qu’il obtiendrait sans trop de difficulté le consentement à son mariage avec Jeanne. Il hésita d’abord avant de répondre aux paroles du vieillard, mais après quelques minutes de réflexion, pendant lesquelles on n’entendait que les sanglots de Mme Montépel, le jeune homme se décida à faire part à son père de la décision irrévocable qu’il avait prise à propos de son union avec Jeanne Girard :

– Je comprends jusqu’à un certain point, mon père, répondit Pierre, et je respecte votre décision à mon égard. Vous ne voulez pas oublier le passé et il m’est impossible, à moi, de faire tomber sur la tête de celle que j’aime, la responsabilité des sentiments politiques de son père et de ses torts envers vous. Votre parole est engagée à Lanoraie, m’avez-vous dit ; la mienne est engagée à Contrecœur. Et comme il y va du bonheur de toute ma vie, vous ne sauriez trop me blâmer de m’en tenir à ma première décision. Quant au scandale que vous paraissez craindre si fort, je