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merce et je vins m’établir plus tard dans l’humble demeure que j’habite encore aujourd’hui. Ma femme, comme je vous l’ai dit déjà, mourut en donnant le jour à Jeanne, et je me consacrai entièrement à l’éducation de mes enfants. Je n’étais pas riche, mais il me fut possible, en travaillant bien fort et en vivant de peu, de donner quelques années de collège à Jules et quelques mois de couvent à Jeanne. J’aurais voulu faire plus, mais mes forces m’abandonnaient graduellement et je me faisais vieux et infirme. Je m’étais scrupuleusement abstenu de me mêler aux luttes politiques, mais je voyais avec douleur notre beau comté de Verchères entre les mains du parti conservateur. L’élément libéral, cependant, faisait des efforts patriotiques pour obtenir le contrôle des affaires, et un jeune notaire du village de Verchères s’était bravement mis sur les rangs pour faire la guerre au chef reconnu des Tories dans le Bas-Canada. Il y avait tous les dimanches, pendant la période électorale, des discussions politiques, sur la place de l’église, entre les candidats rivaux. Je me trouvais un jour, par hasard, à l’une de ces réunions où s’étaient donné rendez-vous les orateurs des deux partis, quand je remarquai parmi ceux qui étaient inscrits pour prendre la parole, la figure du fermier Jean-Louis Montépel, de Lavaltrie. Je