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connaissait. Il répétait, en marchant le long des rues : « J’ai bien fait. Je ne veux plus vous compter, mes chagrins ! Dieu a compté pour moi. Vous m’affaibliriez. Allez-vous en ! » Et une autre voix, nouvelle, et puissante comme toutes les autres ensemble, disait : « Marie était libre, et tu n’y as pas songé ! Marie était libre, libre, libre ! » Ah ! qu’il ne ressemblait guère aux promeneurs affairés ou curieux, à celui qu’il était, la veille encore, ou ce matin ! Par le Corso, par la place de Venise, puis par les petites rues qui tournent autour du Forum, il allait. Plus rien ne l’intéressait, aucune image ne descendait de ses yeux à son âme. Morte la ville, morts les souvenirs qui se relèvent devant nous quand nous repassons par les chemins. Il était séparé de cette saison si pleine de son été romain, de la foule en mouvement, des palais, des fontaines, de tout le connu et de l’inconnu qui l’enveloppait, par l’abîme de l’émotion présente. Elle seule occupait son cœur, elle seule était le monde, elle seule créait et détruisait, en un instant, des visions plus nettes, plus réelles, plus tyranniques que celles de la rue : tout un passé en larmes, et Marie